Géologie de l\'environnement

Géologie de l\'environnement

Notes de cours de Pétrologie exogène et milieux sédimentaires, Par CT MADIENGA KITSHABI Trésor

0. INTRODUCTION GENERALE

 

 

Ce cours de pétrologie exogène et milieux sédimentaires s’adresse aux étudiants de deuxième grade en exploration et production pétrolière en vue de leur fournir des atouts sur l’identification des processus sédimentaires, des milieux de dépôts, sur l’étude de leur évolution au cours du temps et la reconstitution de l’architecture des différents environnements au sein d’un bassin de sédimentation.

 

En effet, la pétrologie exogène (sédimentaire) s’attache, elle à l’étude et la reconstitution des environnements de dépôt anciens, après que les sédiments soient transformés en roches cohérentes et véritables.

 

D’où, l’étude des roches et formations sédimentaires s’avère primordiale dans la reconstitution de l’évolution de notre planète par les études paléogéographiques, paléoclimatiques, depuis l’échelle locale jusqu’à celle des bassins. Cette étude devient donc intéressante dans la prospection des substances utiles que ces roches et formations sont susceptibles de contenir notamment le pétrole, gaz naturel, les gîtes minéraux, etc.  

 

C’est dans cette optique que cet enseignement s’avère donc indispensable dans le cursus académique du futur ingénieur en exploration et production pétrolière dans la mesure où ce cours lui apporte des outils nécessaires  en vue d’une meilleure identification des différents types de roches sédimentaires et de bien cerner leur genèse ainsi que le contexte paléoenvironnemental de cette genèse.

 

Ce cours sera abordé en deux parties :

 

ü La première concerne la sédimentation et la genèse des roches sédimentaires : cette partie va présenter cet ensemble de mécanismes (ou processus) capables de conduire ou de déposer les matériaux issus de l’altération de roches ou de sédiments préexistants dans un bassin (océanique ou continental) et enfin, l’évolution diagénétique de ces matériaux qui les transforme en véritables roches sédimentaires. Ainsi, il sera retenu ici tour à tour le processus sédimentaire et les caractéristiques essentielles des différents milieux de dépôts ;

ü La seconde concerne la pétrologie des roches exogènes : cette partie s’attache à l’identification des roches et formations sédimentaires meubles ou consolidés ainsi formées et aux conditions qui auraient prévalues à leur mise en place ainsi qu’à la reconstitution de leur paléoenvironnement. En fait, à partir de l’étude des sédiments et des roches cohérentes, il possible de déterminer l’origine de matériaux, leurs conditions de transport et les caractères de leur milieu de dépôt mais aussi éventuellement leur évolution post-dépôt (diagénétique). Ainsi, trois niveaux d’observations seront mis en exergue : au niveau des particules sédimentaires (pétrographie sédimentaire), au niveau du banc (stratonomie) et au niveau de l’affleurement (analyse séquentielle).

 

En outre, une certaine accentuation est mise sur l’identification et classification dans le monde des carbonates et celui des détritiques terrigènes.

 

Enfin, à l’issue de ce cours l’étudiant sera capable de :

 

ü Décrire les facteurs (processus) sédimentaires conduisant à l’élaboration des roches sédimentaires ;

ü Caractériser les différents milieux de sédimentation ;

ü Identifier  (ou classifier) les roches carbonatées et celles détritiques terrigènes ;

ü Reconstituer les conditions de mise en place de ces différentes roches et leurs paléoenvironnements (origine de matériaux, leur condition de transport, les caractères de leurs milieux de dépôt et leur éventuelle évolution post-dépôt).

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PREMIERE PARTIE : SEDIMENTATION ET GENESE DES ROCHES EXOGENES

 

 

CHAPITRE I. SEDIMENTATION

 

 

1.1. GENERALITES

 

Les sédiments sont les produits ou matériaux pouvant provenir de l'érosion continentale ou marine, soit aussi des restes (squelettes) ou des sécrétions organiques, soit enfin de la précipitation chimique par évaporation.

 

Les premiers élaborés essentiellement sur les continents ont une origine détritique tandis que les autres ont une origine biochimique. Lorsque ces matériaux arrivent dans un milieu récepteur, communément appelé bassin de sédimentation, ils prennent le nom de sédiments.

 

Nous arrivons ainsi à la notion de sédimentation qui est un ensemble de mécanismes (ou processus) capables de conduire ou de déposer ces matériaux dans un bassin, le bassin pouvant être océanique ou continental. On parlera dans ce cas d’une « sédimentation continentale », lorsque celle-ci s'effectue sur la terre ferme (Ex. dans un lac) ou « sédimentation marine », s'il s'agit de dépôt en milieu marin. L’étude de la roche meuble ou consolidée ainsi formée et les conditions de sa genèse fait l'objet de la pétrologie exogène (pétrologie sédimentaire).

 

1.2. AIRES D'ACCUMULATION DES SEDIMENTS A LA SURFACE DU GLOBE

 

Les bassins sédimentaires se répartissent entre les continents et le milieu marin ou océanique. Dans le milieu continental, les matériaux arrachés par l'érosion seront transportés et déposés dans les lits des rivières ou des fleuves : ce sont des dépôts torrentiels et de plaine alluviale communément appelés dépôts fluviatiles. Dans le domaine glaciaire et périglaciaire, les glaciers de montagnes et les calottes glaciaires (inlandsis) érodent, forment et transportent des matériaux qu'ils peuvent déposer plus loin : ce sont des moraines.

 

Dans le milieu marin, les matériaux peuvent se déposer dans différentes aires réceptrices s'échelonnant tout au long du profil sous-marin. Ces aires de sédimentation sous-marine sont, du voisinage du continent jusqu'au large :

 

ü Aires de plates-formes (plateaux) continentales ;

ü Aires de bassins marins et de bassins marginaux ;

ü Aires de sillons et cordillères ;

ü Aires de plateaux et bassins océaniques.

 

En outre, une partie des sédiments transportés par le fleuve peut être bloquée et échouée à l'embouchure dans les deltas et les estuaires, ce sont les milieux mixtes situés entre le continent et la mer (océan).

 

Il sied d’ajouter que même si des sédiments peuvent se déposer  pratiquement dès leur érosion, leur devenir est en général de terminer leur voyage au sein d'un bassin sédimentaire. Un bassin sédimentaire ne se forme que là où des sédiments peuvent s'accumuler. Cette évidence recouvre un concept majeur : l'accumulation des sédiments nécessite une création d'espace, résultat soit d'un enfoncement de la base du bassin (subsidence), soit d'une hausse du niveau marin.

 

D'une manière générale, on peut distinguer les bassins sédimentaires en fonction de leur position dans le cycle géologique : (1) les bassins sédimentaires actifs, (2) les bassins non fonctionnels (parce qu'exondés) mais peu déformés et (3) les anciens bassins, généralement fortement déformés et incomplets, intégrés dans une chaîne de montagnes.

 

On peut aussi les distinguer sur la base des mécanismes qui les génèrent, c’est-à-dire des mécanismes responsables de leur subsidence (Fig. 1).

 

Fig. 1 : bassins sédimentaires en fonction du contexte tectonique. A : rift continental. B : marge passivce avec structuration en demi-grabens et bassin océanique. C : bassins d'arrière-arc, d'avant-arc et fosse océanique en zone de subduction. D : bassins liés à une faille transformante (décrochement dextre). 

 

ü Les bassins associés à des zones de divergence de plaques tectoniques. Ces bassins se forment là où la croûte terrestre est étirée et amincie :

 

    Rifts continentaux (Fig.1A) : c'est le début de la phase d'ouverture. Le substrat est une croûte continentale. Les remplissages sédimentaires consistent en dépôts continentaux de cônes alluviaux, de lacs, de fleuves (exemple : graben du Rhin, Grands lacs Est-Africains). Du volcanisme est souvent associé, suite à l'extension crustale (basaltes des plateaux, basaltes alcalins,…) ;

    Rifts océaniques : à partir d'un certain stade, le rift continental est envahi par la mer. Les sédiments sont variés, depuis des dépôts continentaux jusqu'à des dépôts beaucoup plus profonds (exemple : sud de la mer Rouge). Le volcanisme est intense et évolue vers des tholéiites ;

    Marges passives et bassins océaniques (Fig.1B) : c'est l'évolution ultime des rifts continentaux. Les marges continentales sont structurées en demi-grabens et de la croûte océanique nouvellement formée sépare les continents. Le volcanisme est réduit au niveau des marges passives et les sédiments sont très variés, depuis des dépôts de plate-forme jusqu'à des dépôts pélagiques (exemple : océan Atlantique).

 

Les épaisseurs sédimentaires diminuent depuis la marge continentale vers le bassin océanique. La subsidence résulte du jeu des failles normales, de la charge sédimentaire et du refroidissement progressif de la croûte océanique.

 

ü Les bassins associés à des zones de convergence de plaques (Fig. 1C) :

 

    Fosses océaniques : ce sont des dépressions océaniques profondes localisées au niveau des zones de subduction. Les sédiments consistent en dépôts pélagiques, associés à des turbidites si le continent est proche. Ces sédiments sont rapidement et intensément déformés suite à la subduction: ils constituent le prisme d'accrétion (exemple: fosse du Japon) ;

    Bassins d'avant-arc : géographiquement proches des précédents, situés comme leur nom l'indique en avant des arcs volcaniques, sur la plaque supérieure. Leur subsidence serait due à la flexure de cette plaque suite à l'entraînement par la plaque subductée. La déformation est moins intense que dans le prisme d'accrétion et les sédiments sont à caractère moins profonds et plus riches en dépôts volcano-sédimentaires (exemple : mer Tyrrhénienne) ;

    Bassins d'arrière-arc: ces bassins ressemblent par leur mécanisme de subsidence et par leur remplissage aux bassins liés à la divergence de deux plaques. Les dépôts volcano-sédimentaires y sont cependant mieux représentés (exemple: mer du Japon) ;

    Bassins d'avant-chaîne : lorsque la subduction de deux plaques se poursuit par une collision continentale, l'épaississement de la plaque continentale supérieure provoque une subsidence due à la surcharge. Les apports en provenance de la chaîne en voie d'érosion sont énormes et les dépôts sont variés (marins, continentaux). Le volcanisme est rare (exemple: plaine du Pô en Italie).

 

ü Les bassins associés à des zones où les plaques continentales coulissent le long de failles transformantes (Fig.1D) : ces bassins s'ouvrent suite à des changements dans la direction de failles décrochantes ou à la présence de zones de relais. Les sédiments sont continentaux et le volcanisme est rare (exemple: bassin de la mer Morte le long de la faille du Levant).

 

ü Les bassins intra-montagneux: ces bassins se forment en contexte d'extension après collision. Ils sont emplis de sédiments continentaux (cônes alluviaux, évaporites, lacs, charbon, rivières,…) (divers exemples dans les Andes et l'Himalaya).

 

ü Les bassins intracontinentaux en contexte atectonique: ces bassins stables et à subsidence relativement faible résultent d'un amincissement modéré de la croûte (sans apparition de rift) ou d'un refroidissement du manteau. La subsidence peut être entretenue par la surcharge sédimentaire. Les sédiments sont continentaux (lacustres, désertiques, etc.) voire marins et ne sont pas plissés (exemple : Bassin de Paris).

 

L'enregistrement géologique montre que certains bassins possèdent une histoire polyphasée et peuvent passer d'un type à l'autre. C'est bien sûr le cas des rifts continentaux qui peuvent évoluer en marge passive/bassins océaniques et aussi celui des fosses océaniques/bassins d'arrière-arc/bassins d'avant-arc qui peuvent être repris dans un bassin d'avant-chaîne lors d'une collision continentale.

 

 

 

 

1.3. FACTEURS DE FORMATION DES ROCHES DETRITIQUES ET PROCESSUS DE LA SEDIMENTATION DANS LE CYCLE GEOLOGIQUE

 

1.3.1. Facteurs de formation des roches détritiques

 

Trois facteurs conditionnent la formation des roches détritiques. Il s'agit de :

 

ü L’altération ou la désagrégation de la roche ;

ü L'érosion et le transport des matériaux ainsi libérés ;

ü Le dépôt ou la sédimentation de produits et matériaux.

 

Ainsi, le premier facteur s'exerce aussi bien sur le continent que dans la mer, c'est le milieu générateur. Le second dans l'eau ou l'air, c'est le milieu transporteur. Le dernier s'illustre dans le milieu continental ou marin, c'est le milieu récepteur.

 

1.3.2. Processus sédimentaire dans le cycle géologique

 

Les roches peuvent être classées en trois grands groupes qui sont les roches ignées ou magmatiques, les roches sédimentaires et les roches métamorphiques. Les roches ignées résultent du refroidissement et de la cristallisation de magmas, issus soit du manteau, soit de la fusion de roches métamorphiques. Les roches métamorphiques résultent de la modification, par l'action de la chaleur et de la pression, de roches ignées ou sédimentaires, lesquelles proviennent de la lithification par diagenèse de sédiments.

 

Comme ces sédiments proviennent de la désagrégation de roches sédimentaires, métamorphiques ou magmatiques, l'ensemble de ces phénomènes forme un cycle appelé « cycle géologique » (Fig.2).

 

 

Fig. 2 : Le cycle géologique. 

 

Au sein du cycle géologique, les processus sédimentaires comprennent l'altération, l'érosion, le transport, le dépôt et la diagenèse (Evolution post-dépôt). Les sédiments détritiques, formés de grains issus de la dégradation de roches préexistantes, transportés et déposés dans un bassin de sédimentation, constituent l'illustration la plus évidente de cette partie du cycle géologique (Fig. 3).

 

 

 

Fig. 3 : Le processus sédimentaire dans le cycle géologique. 

 

Dans le cas des sédiments biogènes et chimiques, résultats de la précipitation organique et/ou chimique, les constituants sont amenés au bassin sédimentaire sous la forme d’ions solubles. Une exception notable est cependant fournie par les sédiments d'origine volcanique, où les particules sont injectées directement dans le milieu de dépôt.

 

Plus spécifiquement, l’altération est la destruction de roches ignées, métamorphiques ou sédimentaires par désagrégation mécanique et décomposition chimique, voire biologique (gélifraction, insolation, décompression, action des racines, de l'eau, du vent, etc.). L'altération donne naissance à une grande variété de produits : sols, débris rocheux, ions en solution dans les eaux superficielles. L'érosion correspond à l'enlèvement de ces produits d'altération des zones d'altération active et le transport est leur mouvement vers les zones de dépôt. La lithification est le résultat de ce processus physico-chimique, appelé « la diagenèse » qui comprend la compaction, la cimentation, la recristallisation et la métasomatose. L’ensemble de ces phénomènes permet la transformation d’un sédiment frais à une roche cohérente (consolidée).

 

Dans le chapitre qui va suivre, ces différents processus sédimentaires seront traités séparément dans l'ordre de leur intervention dans le cycle géologique.

CHAPITRE II. GENESE DES ROCHES EXOGENES

 

 

Une roche sédimentaire (exogène) se forme au voisinage de la surface par transformation des sédiments qui y sont naquis ou déposés. Ces roches constituent des motifs édificateurs de couches sédimentaires. Un ensemble de couches considérées dans leur succession chronologique constitue une formation ou une série sédimentaire.

 

Comme nous l’avons dit, les roches sédimentaires (ou roche exogène) font partie inhérente du cycle géologique, puisque leurs constituants (grains ou ions solubles) résultent de l'altération de roches ou de sédiments préexistants, que ces constituants ont subi un certain transport et qu'ils se sont déposés ou ont été précipités dans un bassin de sédimentation. L'évolution post-dépôt de ces sédiments (diagenèse) les transforme en roches sédimentaires. Ces roches peuvent subir un métamorphisme et être à leur tour soumises à l'altération lors de leur passage à la surface des continents.

 

2.1. ALTERATION OU DESAGREGATION D’UNE ROCHE

 

Si l’on examine un sable fluviatile dans la partie amont du bassin versant d’une zone où affleurent des granites (30 à 50% plagioclases, 5 à 35% FK, 5 à 10% quartz), on constatera paradoxalement que le quartz en est un minéral essentiel. Dans la partie aval du système fluviatile, il peut même être pratiquement seul. C'est l’altération qui est responsable de l'augmentation de la proportion de quartz (minéral résistant) dans les sédiments.

 

En effet, les silicates de haute tempé

rature (péridots, pyroxènes, plagioclases calciques...) sont vulnérables à l'altération car l’arrangement des tétraèdres de silice est peu organisé (Néso -, soro -, inosilicates). Les minéraux de moyenne et basse température (Inosilicates à deux chaînes, phyllo- et tectosilicates) sont plus résistants. Les verres, amorphes car figés à très haute température, sont les plus vulnérables. Donc, la vulnérabilité à l’altération des minéraux issus de la cristallisation d'un magma décroît proportionnellement à l'ordre de cristallisation précisé, entre autres, dans les séries réactionnelles de Bowen (autre manière d'exprimer les choses...). Dans le cas du quartz, il faut ajouter le fait que ce minéral possède aussi une bonne résistance aux chocs car il ne se clive pas.

L'altération a pour effet de décomposer une roche  (éruptive, métamorphique ou sédimentaire originelle) en :

 

ü des ions solubles et des grains qui vont être mobilisés par l'érosion d'une part et ;

ü Un dépôt résiduel d'autre part, demeurant sur place.

 

Les mécanismes responsables de l’altération, phénomène prenant place aux températures et pressions « faibles » régnant à la surface de la terre, sont les actions physiques (mécaniques) d’une part et les actions organiques et/ou chimiques d'autre part.

 

2.1.1. Actions physiques ou mécaniques

 

Les processus mis en œuvre dans l’altération physique ou mécanique sont les suivants (Fig.4a et 4b) :

 

ü Les alternances de gel-dégel, en climat suffisamment humide, fragmentent les roches (cryoclastie). L'eau en gelant augmente son volume de 9-10% et agit comme un coin, élargissant progressivement les fractures ;

ü Les variations répétées de température (40-50°C d'amplitude journalière dans le Sahara) ont aussi le même effet que le gel : les différences de dilatation thermique entre les minéraux d'une roche provoquent l'apparition de fractures ;

ü La cristallisation de sel ou d'autres minéraux évaporitiques peut également élargir les fissures des roches (haloclastie, fig.3b) ;

ü La décompression survient lorsque des roches ayant subi un enfouissement sont libérées de la pression lithostatique par enlèvement des formations surincombantes. Des joints de décompression, pratiquement parallèles à la surface du sol se développent progressivement ;

ü l'usure mécanique par des grains détritiques emportés par le vent, l'eau, la glace.

 

 

 

 

 

 

Fig. 4a. Les exemples d’altération physique ou mécanique. A : cryoclastie d'un basalte (roche macrogélive) ; B: cryoclastie d'un schiste (roche microgélive) ; C: joints de décompression dans un massif granitique ; D: glace chargée de sable et de graviers.

 

 

Fig. 4b. Haloclastie (cristallisation de sel) d'une croûte calcaire en milieu évaporitique (B) et (A).

 

 

2.1.2. Actions organiques ou biologiques

 

Nous distinguerons ici l'altération provoquée par l'action chimique de composés produits par des organismes (plantes, microbes,...) de l'action purement mécanique de plantes ou d'animaux (par exemple : dilatation progressive des racines jouant le rôle de coin dans des fractures de roches). L'ingestion de matériaux par des animaux vivant dans les sols est un processus faisant intervenir en même temps les deux types de mécanismes cités.

 

Un premier processus important est l'oxydation de la matière organique (par la fermentation ou la respiration), produisant de l'eau et du CO2, lui-même impliqué dans des réactions de mise en solution :

 

C6H12O6 + 6 O2  → 6 CO2 + 6 H2O

 

La combinaison du CO2 et de l'eau donne naissance à l'acide carbonique (H2CO3), un acide faible qui peut néanmoins solubiliser la calcite (ou un autre carbonate):

 

H2CO3 + CaCO3 → Ca++ + 2 HCO3-

 

On a en effet observé que pour une concentration de CO2 équivalente à la concentration atmosphérique (~3.10-4 atm), la concentration de Ca++ et HCO3- était de respectivement de 20 mg/l et 60 mg/l. Dans un sol où la concentration de CO2 peut atteindre 3.10-2 atm, les concentrations respectives de Ca++ et HCO3- peuvent augmenter jusqu'à 90 mg/l et 260 mg/l.

 

L'action des microorganismes est importante et ne se limite pas à la production de CO2. Dès leur arrivée en subsurface, les minéraux des roches sont soumis à leur métabolisme. Des colonies microbiennes croissent à leur surface, s'infiltrent dans les fractures à la recherche d'éléments essentiels à la vie. L'altération microbienne se manifeste surtout sous la forme d'une dissolution par des acides organiques dont le plus fréquent est l'acide oxalique. L'attaque des minéraux par ces acides libère des cations métalliques qui, combinés aux anions organiques donneront naissance à des complexes organo-métalliques (dans le cas des oxalates, combinés au calcium issu de la dissolution des carbonates, cela donnera naissance à CaC2O4, fréquent dans les sols). Beaucoup de microbes possèdent la faculté de produire des molécules spécifiques en fonction du type de minéral à dégrader. L'exemple de la Fig. 5 montre la mise en solution du fer à partir de hornblende (Amphibole Ca-Fe-Mg) par des bactéries.

 

 

Fig. 5 : Mise en solution du fer à partir de hornblende, avec ou sans l'intervention de la bactérie du sol Streptomyces. D'après Konhauser (2007), simplifié.

 

Outre l'action des acides organiques, la formation de polymères extracellulaires maintient une hydratation constante autour des minéraux qui favorise les réactions de mise en solution.

 

Ces processus d'altération microbienne par dissolution de minéraux primaires et précipitation de nouveaux minéraux d'origine biogénique (comme l'oxalate de calcium) modifient l’aspect de la roche et méritent le nom de "diagenèse microbienne". Cette diagenèse particulière se marque souvent par la précipitation de microcristaux en remplacement de cristaux plus grands. C'est le processus de « micritisation » dans le cas des carbonates, fréquent en particulier dans les sols.

 

 

2.1.3. Actions chimiques

 

L’altération chimique agit de deux façons : certains minéraux (halite, calcite) sont dissous totalement et leurs ions sont évacués en solution. D’autres minéraux, comme les micas ou les feldspaths sont transformés en d’autres espèces minérales (surtout en argiles), souvent de granulométrie plus fine et plus facilement mobilisables par l’érosion. La plupart des réactions impliquées dans l’altération nécessitent la présence d'eau et d’air. Passons en revue les réactions les plus significatives.

 

2.1.3.1. Principales réactions chimiques impliquées dans l’altération

 

ü Mise en solution (dissolution) : c’est la réaction la plus simple, faisant intervenir de l’eau, ou un acide. Envisageons quelques cas concrets :

 

    La solubilité du quartz est très faible (6 ppm dans les eaux de surface). La réaction de mise en solution est la suivante :

SiO2 + 2H2O → H4SiO4

    La calcite, par contre est beaucoup plus soluble, parce que l'eau de pluie se charge en CO2 et agit comme un acide faible lors de sa mise en contact avec la calcite (environ 2000 ppm). La réaction est la suivante : CaCO3 + H2O + CO2 → Ca++ + 2HCO3- (bicarbonate en solution).

    La halite (NaCl) et les autres halogénures sont très solubles (solubilités de l'ordre du millier de ppm).

 

ü Hydratation et déshydratation, ou de manière plus concrète : minéral + eau = nouveau minéral hydraté. La déshydratation étant le processus inverse. Les réactions les plus importantes sont :

 

    La déshydratation du gypse pour produire de l'anhydrite : CaSO4.2H2O → CaSO4+2H2O ;

    L'hydratation de l'hématite pour produire de la limonite : Fe2O3 + 3H2O → 2Fe(OH);

    L'hydratation de la kaolinite pour produire de la gibbsite.

 

ü Hydrolyse : cette réaction est le processus par lequel un cation d'un minéral est remplacé par le H+ d’une solution acide. Cette réaction a pour conséquence de détruire le minéral (mise en solution complète) ou de le convertir en une nouvelle espèce. A titre d'exemple, l'olivine et le pyroxène se dissolvent complètement, alors que les feldspaths se dissolvent partiellement, produisant de la silice en solution et des minéraux argileux. Comme les eaux météoriques contiennent du CO2 dissout, les réactions se présentent comme suit :

 

    Mg2SiO4 (forstérite) + 4 H2 CO3 → 2 Mg++ + 4 HCO3- + H4SiO4

    4 NaAlSi3O8 (albite) + 4 H2 CO3 + 18 H2O → 4 Na+ + 8 H4SiO4 + Al4Si4O10(OH)8 (kaolinite) + 4 HCO3-

 

N.B. : Ces réactions d'altération des minéraux silicatés sont donc des "pompes" à CO2 atmosphérique.

 

ü Oxydation-réduction : Le processus d'oxydation le plus connu est la transformation de Fe2+ en Fe3+; le Mn se comporte de la même manière que le fer, avec la pyrolusite (MnO2) et la manganite (Mn2O3.H2O) comme principaux produits d'oxydation.

 

    (Fe2+)2SiO4 + 1/2 O2 + 5 H2O → 2 Fe3+(OH)3 + H4SiO4

    4 FeS2 + 15 O2 + 8 H2O → 2 Fe2O3 + 8 H2SO4

 

Tableau 1 : Produits les plus courants de l'altération chimique.

Constituants solubles

Na+, Ca2+, K+, Mg2+, H4SiO4, HCO3-, SO42-, Cl-

Minéraux résiduels

quartz, zircon, magnétite, ilménite, rutile, grenat, sphène, tourmaline, monazite

Minéraux néoformés

kaolinite, montmorillonite, illite, chlorite, hématite, goethite, gibbsite, boehmite, diaspore, silice amorphe, pyrolusite

Constituants organiques

acides organiques, acides humiques, kérogène

 

2.1.3.2. Paramètres qui contrôlent l’altération chimique

 

Le climat est probablement le facteur le plus important dans le contrôle de l'altération chimique. Si l'on considère en effet l'aspect cinétique des réactions chimiques, il est clair qu'une température élevée va les favoriser. L'humidité est également importante, puisque beaucoup de réactions se passent en milieu aqueux. L'altération chimique est donc prééminente en climat chaud et humide. En climat froid, même si les précipitations sont abondantes, l'eau est à l'état de neige ou de glace, favorisant plutôt l'altération physique (Fig. 6). D'autres facteurs occupent également une place importante, quoique plus indirecte: c'est par exemple le cas du drainage. Si les ions mis en solution ne sont pas évacués, un équilibre chimique sera atteint et les réactions d'altération vont s'arrêter.

 

Le relief ou la topographie, également, contrôle la pente des réseaux fluviatiles et la rapidité des courants, donc l'intensité de l'évacuation des ions: on a pu montrer par exemple que pour des circulations faibles, l'albite est transformée en kaolinite, alors qu'avec une circulation plus rapide, elle est transformée en gibbsite (car l'acide silicique est évacué).

 

 

Fig. 6 : Influence du climat sur le profil d'altération. En climat tempéré, l'altération mécanique domine. L'altération biochimique est faible et consiste surtout dans le départ de cations très solubles comme Na+ et Ca++ des minéraux les moins stables (A). En climat aride, la pluviosité très faible et la forte évaporation permettent la précipitation sur place des cations solubles et la constitution d'un horizon induré (calcrete, silcrete, B). En climat tropical humide et en climat équatorial, l'altération est surtout chimique. L'eau abondante et chaude provoque une mise en solution de la plupart des minéraux, avec précipitation des ions Fe, Al, Si et développement d'une cuirasse latéritique. Un horizon riche en argile se met aussi en place et résulte de processus de néoformation à partir des minéraux de la roche-mère et à partir des ions venant des horizons supérieurs (C).

 

L'acidité-alcalinité et le degré d'oxydo-réduction des eaux sont également des paramètres importants contrôlant l’altération chimique. Si l'on porte en graphique l'Eh en fonction du pH pour des environnements naturels variés (Fig. 7), on constate que l'eau pluviale est légèrement acide, tout comme les sols. Ce sont donc deux environnements où dissolution et hydrolyse vont jouer un rôle dominant. Par contre, le pH de l'eau de mer est de l'ordre de 8 : peu de réactions d'hydrolyse ont donc lieu en milieu sous-marin. On observe aussi que la plupart des environnements en contact avec l'atmosphère sont oxydants. Des conditions réductrices ne sont observées que dans des milieux isolés de l'atmosphère (bassins stratifiés, nappes profondes,...) ou des milieux dont tout l'oxygène est consommé (par exemple suite à l'oxydation de la matière organique).

 

 

Fig. 7 : Graphique des propriétés Eh/pH des principaux environnements naturels.

 

2.1.3.3. Exemple : l’altération des roches magmatiques

 

Ces roches sont en déséquilibre thermodynamique lors de leur arrivée à l'affleurement. Il s'agit généralement de roches polyminérales et leur sensibilité à l'altération est fonction à la fois de l’altérabilité des différents minéraux et de la structure de la roche. A sensibilité égale des minéraux, les roches à gros grains (pegmatites) sont plus vulnérables que les roches à grains fins (aplites).

L’altérabilité des minéraux constituants des roches magmatiques est en fonction inverse de leur ordre de cristallisation dans les magmas. Cette relation est également présente dans le groupe des feldspaths, où l’orthose est peu altérable, alors que les plagioclases le sont plus. Au sein des plagioclases, la sensibilité à l'altération augmente de l'albite à l'anorthite.

 

Prenons l'exemple des réactions mises en jeu lors de l'altération de l’orthose :

 

ü Les premiers stades de l’altération de l'orthose aboutissent à la formation de minéraux argileux, l'illite, ou si le drainage est mauvais, les smectites : orthose + eau  → illite + silice + potassium (entraîné en solution). Ce processus est appelé bisiallitisation car le rapport Si/Al (égal à 3 dans l'orthose) est de 2 dans l’illite ;

ü En cas de lessivage plus important de la silice (altération plus poussée), on obtient de la kaolinite ou le rapport Si/Al est de 1. Il s'agit du processus de monosiallitisation ;

ü Enfin, dans le stade ultime (climat tropical humide), toute la silice est lessivée et il ne subsiste qu'un hydroxyde d'aluminium, la gibbsite, dans laquelle le rapport Si/Al est égal à zéro. Ce processus est appelé allitisation et aboutit à la formation de bauxites mais, comme le plus souvent le produit d'altération contient du fer, on parle de ferrallitisation ou de latéritisation.

 

2.2. EROSION ET TRANSPORT

 

Parmi les agents principaux qui favorisent l’érosion et le transport, nous avons : la pesanteur, l’eau, le vent et la glace.

 

2.2.1. Action de la pesanteur

 

Avant leur mobilisation par le vent, le ruissellement ou les torrents, les fragments de roche détachés de leur substrat par l'érosion subissent un transport sous la forme d'avalanche de débris ou des écroulements de roches. La pesanteur agit préférentiellement dans les terrains à reliefs jeunes. Elle s'exprime généralement par des cônes d'éboulis se développent aux pieds de ces reliefs et sont caractérisés par un classement et une maturité très faibles.

 

Dans ces types de processus, les fluides ne jouent qu'un rôle mineur, par leur effet lubrifiant à la base des unités transportées. Ces phénomènes déplacent des masses considérables de sols et débris rocheux sur des distances courtes (de l’ordre du km). Leur impact sédimentaire est pourtant important, car ils mettent les matériaux mobilisés à la disposition du système fluviatile.

 

Il important de signaler que les glissements en masse et écroulements en l’absence de fluide correspondent au déplacement de matériel par translation ou rotation le long d’une surface de rupture.

 

L'action de la pesanteur se manifeste également dans les environnements calcaires. Ceux-ci sont généralement minés par le phénomène de dissolution karstique et ont tendance aux éboulements catastrophiques.

 

L'action de la pesanteur combinée à celle de l'eau peut provoquer des glissements de terrain gorgé d'eau, des glissements sous-marins et sorts-lacustres (slumping) affectant des vases sur des pentes parfois très faibles. Le glissement sous-marin pourrait provoquer (avoir) une action érosive sur le fond marin. On parle alors des écoulements gravitaires : des phénomènes par lesquels les particules sédimentaires sont en suspension dans un fluide, mais leur mouvement est dû à la gravité (la force de pesanteur), non au déplacement du fluide lui-même (à la différence d’un écoulement liquide conventionnel).

 

2.2.2. Action de l’eau courante

 

L'eau est l'agent d'érosion et de transport le plus actif. La rigueur, de son action étant fonction à la fois de dimension des particules et de la vitesse du courant.

 

Plusieurs modes de transport ont été observés (Fig.8) : il s’agit du roulement et de la traction le long du fond ou du substrat, de la saltation (transport par bonds, suite à des chocs successifs) et du transport en suspension. Les particules en mouvement par roulement, traction et saltation constituent la charge de fond ("bedload"), généralement formée de galets et de sable. La charge en suspension est surtout constituée d’argile et de silt (ceci étant vrai à la fois pour les écoulements d'air et d'eau). La charge en suspension des écoulements turbulents est beaucoup plus importante que celle des écoulements laminaires.

 

Fig.8 : Modes de transport des particules dans un courant.

 

Nous allons étudier successivement l'action de l'eau sur le transport des particules, des matériaux à l'état colloïdal et en solution sans oublier les conditions climatiques.

 

2.2.2.1. Transport des particules

 

L'érosion, le transport et la sédimentation de particules sont fonction des vitesses du courant auxquelles elles sont soumises. Ainsi, l'érosion sera beaucoup plus importante pour les particules moyennes (0,1 à 1mm). Le transport maximal pour les particules très fines et la sédimentation très importante pour les particules grossières (> 1 mm).

 

La granulométrie des particules sédimentaires a donc une influence majeure sur leur transport (et sur leur vitesse de sédimentation). Ces relations sont synthétisées par le diagramme de Hjulström (Fig. 9).

 

Ce graphe (essentiellement basé sur des expériences en laboratoire) montre la vitesse minimale d'un courant nécessaire pour mobiliser, transporter et déposer des grains de quartz de granulométrie variable. Si l'on examine d'abord la partie supérieure de ce graphe (érosion des particules), la portion de la courbe représentant l'érosion des particules moyennes à grossières (sable fin à galets) semble logique : la vitesse du courant nécessaire pour mobiliser des grains augmente avec leur granulométrie. Pour les particules fines, par contre, la courbe montre une augmentation de la vitesse du courant avec la diminution de la granulométrie.

Ce comportement paradoxal est la conséquence de la cohésion élevée des particules fines, surtout liée à un effet électrostatique. La partie inférieure du graphe montre la relation entre la granulométrie des particules et la vitesse du courant lors de leur dépôt.

 

 

Fig. 9 : Diagramme de Hjulström.

 

2.2.2.2. Transport des matériaux à l'état colloïdal et en solution

 

Les ions issus de la dissolution des matériaux peuvent floculer et donner des substances colloïdales ou rester en solution. Tout comme le transport, les deux états de la matière dépendent du pH de la solution. Ainsi, en - dessous du pH 4, l'alumine est très soluble, tandis que la silice l’est beaucoup moins.

Alors que du pH 4 au pH 9, la silice sera facilement dissoute tandis que l'alumine sera insoluble, il y aura donc transport de la silice et dépôt d'alumine.

 

Il sied de noter que dès qu'une particule est mise en suspension, elle commence aussitôt à sédimenter. Sa vitesse de sédimentation est donnée par la loi de Stokes : v = c.d2 où :

ü c, est une constante égale à : (ρpf).g/18µ ;

ü v représente la vitesse de sédimentation ;

ü µ, la viscosité du fluide, ρf sa masse volumique et ρp celle de la particule ;

ü d, est le diamètre de la particule.

Ce qui signifie bien sûr qu’à minéralogie constante, la vitesse de sédimentation augmente avec la taille des grains. Quelques remarques supplémentaires déduites de cette formule : les minéraux lourds, dont la densité est élevée, sédimentent rapidement ; les fluides très visqueux, comme les coulées de boue peuvent transporter des grains beaucoup plus gros que les fluides moins visqueux.

 

Remarquons que la loi de Stokes est normalement valable pour des particules sphériques. En fait, des particules allongées comme les paillettes de micas ont une vitesse de sédimentation plus lente que celle théoriquement prévue. Un autre écart à la loi théorique est constaté pour les particules très anguleuses qui génèrent autour d’elles de petits tourbillons qui ralentissent leur chute.

 

2.2.2.3. Influence climatique

 

Les conditions dans lesquelles le matériel est transporté par l'eau dépendent beaucoup des conditions climatiques. En effet, en milieu humide, une partie importante du matériel transporté reste en solution et donc facilement transportable, tandis que dans le milieu aride au contraire tous les éléments transportés finissent par précipiter.

 

2.2.3. Action de l'eau dans le milieu marin

 

Le milieu marin ou océanique est un domaine très étendu qui donne naissance aux dépôts des précipités chimiques ou biochimiques. A ces dépôts s'ajoute du matériel détritique allogène représenté par l'apport des fleuves, celui de l'érosion côtière, des poussières cosmiques, de remaniement et d'érosion de dépôts sous-marins terrigènes ou organiques préexistants, les formations volcaniques sous-marines et les apports éoliens désertiques ou steppiques.

 

Les produits allogènes et océanogènes accomplissent souvent de longs trajets avant de se déposer. Les facteurs de transport sont principalement les vagues et les courants sous toutes leurs formes et leurs origines. Le matériel grossier, déposé le long de la côte se déplace lentement et se maintient sur le fond où il roule et s'use. Le reste étant plus fin est mis en mouvement dès que le rapport dimension, vitesse du courant, pente, est suffisant.

 

Le matériel sédimentaire mobilisé subit ensuite un tri granulométrique efficace : le matériel fin est emporté vers les larges ou déposé dans des zones calmes alors que le matériel grossier s’accumule à proximité de la côte. Les sédiments mis en suspension par les vagues peuvent être également transportés par les courants. Les grains de sable qui subissent l’action des vagues et des courants prennent un aspect luisant (« émoussé-luisant » par opposition au « rond-mat » du transport éolien).

 

En effet, la vitesse avec laquelle un sédiment gagne le fond est fonction de dimension de ses grains, de sa densité, de sa forme, de la température, de la viscosité de l'eau et de la force de gravité, cette dernière étant liée à la morphologie du fond océanique.

 

 

Fig. 10 : A: sable quartzeux éolien dont les grains ont un aspect "rond-mat". B: sable marin, également quartzeux, dont les grains ont un aspect "émoussé-luisant". Ces différences reflètent la nature différente de l'agent de transport.

 

2.2.4. Action du vent

 

Le vent est le principal agent atmosphérique de l'érosion et de transport. Le transport par le vent est surtout effectif et efficace dans les pays arides là où la présence d’une couverture végétale diminue en effet fortement son action protectrice. Il ne peut déplacer que des éléments fins (les limons sont entraînés à partir d'une vitesse de 3m/s, alors que les sables nécessitent 10m/s). Il faut aussi que la nature du sol soit favorable à ce type de transport et d'érosion. Comme le ruissellement pluvial, le vent joue un grand rôle dans l'érosion des sols fertiles. Le sol desséché est soulevé sous la forme de fines poussières par le vent qui les dépose plus loin ailleurs.

 

L’influence du vent n'est pas restreinte aux seules régions arides chaudes, on en observe les effets dans toutes les régions subdésertiques quel qu'en soit le climat. C’est le cas des zones côtières supralittorales et des zones périglaciaires riches en matériaux détritiques sous forme de dépôt de lœss, de sols polygonaux, de sables éoliens, de galets éolisés, des dunes, etc.

 

Le gel apparaîtra ainsi comme un autre facteur susceptible de favoriser le phénomène éolien. Le vent agit, peu isolement, même à grande vitesse. Son efficacité abrasive est principalement due à sa charge en poussières et en sable, on parle donc de la corrasion.

 

Les grains transportés par le vent sont piquetés et mats, subsphériques. Ils sont appelés « ronds-mats » en morphoscopie (Fig. 10) et présentent des croissants et des figures en V, dus aux chocs. La concentration plus grande des grains de sable à proximité du sol provoque une érosion différentielle avec la formation de rochers en champignons. Lorsqu’elle s’exerce sur des roches où alternent lits, lamines durs et plus tendres, la corrasion provoque une érosion différentielle qui met en évidence le contraste de dureté.

 

2.2.5. Action de la glace

 

L’érosion glaciaire se manifeste surtout lorsque la température à la base du glacier est suffisamment élevée pour qu’un film d’eau se forme au contact du substrat (glacier à base tempérée). Ce film favorise le glissement du glacier et l’incorporation de débris dans la glace. Dans le cas contraire (glacier à base froide), le glacier ne se déplace que par déformation plastique et l’érosion est minimale.

 

Les glaciers érodent, transportent les matériaux érodés et les déposent par suite de la fusion de la glace. Les dépôts glaciaires sont reconnus aisément par leur hétérogénéité. En effet, les matériaux sont de toutes dimensions depuis les blocs énormes jusqu’à une purée (forme broyée) des roches et des minéraux. Dans ce domaine glaciaire, on observe très souvent une association entre les dépôts torrentiels et les dépôts glaciaires, du fait que chaque glacier est accompagné d'un torrent sous-glaciaire. Les formes remarquables de l’érosion glaciaire sont visibles à deux échelles :

 

ü A grande échelle, on observe des vallées caractéristiques, dites « en U » ou « en auges » dont la section transversale en auge avec des parois verticales s’oppose à la forme « en V » des vallées fluviatiles. Cette forme caractéristique s’explique par une érosion latérale plus importante que l’érosion verticale.

ü A petite échelle, l’érosion glaciaire se manifeste par des surfaces polies et arrondies (roches moutonnées) souvent striées par des blocs durs enchâssés dans la glace (strie glaciaires).

 

N.B. : Dans beaucoup de cas, ces roches moutonnées présentent une pente plus faible vers l'amont (usure) que vers l’aval (arrachement de blocs), permettant de reconstituer le sens d’écoulement des glaciers.

 

2.3. MILIEUX DE SEDIMENTATION

 

Comme nous l’avons vu dans le chapitre 1, les aires de dépôts des sédiments se répartissent entre les continents et les milieux marins. Ainsi, les matériaux arrachés par l'érosion seront déposés sur le continent, dans la mer (océan) et enfin dans le domaine mixte situé entre le continent et la mer.

 

2.3.1. Milieu continental

 

Le continent sera le premier milieu à recevoir ses propres matériaux. Les sédiments continentaux sont essentiellement les produits de l'érosion, c'est-à-dire des matériaux détritiques caractérisés par leur gabarit, allant de blocs aux poussières de dimension colloïdales. Ce milieu est largement influencé par le climat (C'est-à-dire, la température et l’humidité).

 

On distingue trois milieux principaux : le milieu fluviatile, le milieu lacustre et le milieu glaciaire auxquels il faut ajouter la sédimentation éolienne.

 

2.3.1.1. Milieu fluviatile

 

Les sédiments fluviatiles comprennent le dépôt torrentiel et le dépôt de plaine alluviale.

 

1° Dépôts torrentiels

 

Le cours d'eau et le torrent débouchant dans une vallée abandonnent leur charge qui peut donner lieu à un cône alluvial. Celui-ci s'édifie généralement aux pieds des reliefs nourriciers. Les torrents forment la partie amont des systèmes fluviatiles, localisés dans des régions fortement déclives. Ces dépôts se reconnaissent par plusieurs caractères :

 

ü Marque d'altération absente : les décharges détritiques brutales et rapprochées soustraient rapidement le sédiment aux agents météoriques ;

ü Caractère grossier et peu usé du matériel : le sédiment est immature car son origine est locale et le transport limité ;

ü Mauvais classement des particules et mauvais litage : le dépôt s'effectue en vrac.

 

Le pouvoir de transport des torrents est considérable et très variable. Les dépôts torrentiels sont très répandus aux pieds de grandes chaînes de montagnes (Exemple, Himalaya, Alpes, etc.), et les conditions de dépôt varient en fonction du climat. Ainsi, en pays aride ou semi-aride, le matériel connaît très peu de décomposition tandis qu'en pays humide le matériel sera très décomposé.

 

2° Dépôts de plaine alluviale

 

Comme pour les torrents la nature des sédiments transportés par les rivières et les fleuves varie considérablement avec le climat et la topographie. Ces dépôts communément appelés dépôts fluviatiles sont caractérisés par :

 

ü Une stratification lenticulaire caractéristique des sédiments déposés dans les chenaux ou dans les flaques d'eau, la stratification oblique arquée prédomine ;

ü Un sens d'écoulement unidirectionnel.

ü Un ordonnancement de dépôts en séquences ayant enregistré de bas en haut la décroissance de la compétence du courant au cours du temps : la base est ravinante, la granodécroissance est nette, le litage horizontal succède à un litage oblique, l'amplitude des structures sédimentaires diminue vers le sommet.

 

On distingue au sein d'une sédimentation fluviatile deux faciès principaux :

 

ü Le faciès des chenaux : à sédiment grossier et restes organiques rares et brisés. Il se dépose lors d'une crue ;

ü Le faciès des flaques d'eau calme : à sédiment fin et à nombreux organismes autochtones. Il se dépose lors des périodes d'étiage ou à l’abri des courants actifs.

 

Le réseau fluviatile peut appartenir à deux types extrêmes. Ainsi, on distingue :

 

ü le réseau fluviatile à chenaux anastomosés (braided river) : ce réseau se développe sur les pentes fortes et la charge sédimentaire y est importante. Les tracés des chenaux changent fréquemment au cours des crues successives et brutales (Fig.11a). Les dépôts sont généralement grossiers.

ü Le réseau fluviatile à méandres : le réseau se développe en pays plat, dans une plaine alluviale où la pente est réduite au maximum. Il en résulte que les cours d'eau sont lents et transportent essentiellement des sédiments fins. Les dépôts s'accumulent aux rives convexes des chenaux et forment des barres de méandre (point bar) tandis que les rives concaves sont soumises à une attaque en règle des eaux de la rivière (Fig.11b). Des variations des niveaux de base peuvent entraîner la formation des terrasses. La rivière en s'enfonçant abandonne ses alluvions formant les épaulements sur les flancs des vallées (Fig.11c).

 

 

Fig. 11 : Réseaux fluviatiles

Dans une série des terrasses emboîtées, les terrasses les plus élevées seront les plus anciennes et les plus basses les plus récentes.

 

Toutefois en cas d'oscillation au lieu de creusement il peut y avoir remblaiement et les seules considérations d'altitude relative ne sont donc pas suffisantes pour dater les terrasses.

 

2.3.1.2. Milieu lacustre.

 

La sédimentation en milieu lacustre est tributaire du climat et des apports des cours d'eau. En dehors des zones de deltas, la stratification du sédiment est plane et parallèle. Les dépôts ont tendance à s'ordonner en auréoles concentriques de granulométrie décroissante du rivage vers le centre du lac. L'établissement d'une nappe d'eau calme favorise la sédimentation argileuse ou calcaire. Les eaux lacustres sont soumises à des variations importantes de leur concentration géochimique par suite des fluctuations climatiques.

 

L'alternance des saisons peut donner naissance à des séries varvées. Un climat plus aride provoque la stagnation des eaux et la précipitation d'évaporites ou la concentration de certains minéraux (Ex. les minéraux de fer). Les sédiments lacustres sont souvent associés à des dépôts fluviatiles avec lesquels ils ne sauraient cependant être confondus.

 

La faune lacustre est pauvre en espèces par rapport à la faune marine. Elle consiste surtout en lamellibranches et gastéropodes d'eau douce et en poissons. Les organismes fouisseurs sont généralement rares car l'aération du sédiment est déficiente. La flore prospère près des rives.

 

2.3.1.3. Milieu glaciaire

 

Comme nous l'avons vu, les glaciers érodent, forment et transportent les matériaux appelés moraines dans lesquels on distingue les moraines de surface (frontale, latérale et médiane) et les moraines de fond. Les moraines de fond, reconnues pour leurs facultés abrasives, sont composées d'éléments d'assez forte taille (blocaux) et de boue ; et les moraines de surface comprennent surtout les matériaux grossiers. L'origine des sédiments est locale et le transport relativement court. Il s'ensuit que les grains ou éléments demeurent anguleux. Par suite de basses températures, les minéraux fragiles comme les feldspaths et les ferromagnésiens n'ont subi aucune altération, le sédiment est immature. Le matériel sédimentaire transporté dans les moraines souvent remanié par les torrents glaciaires, est caractérisé par une absence totale de classement : des blocs, des cailloux souvent anguleux et striés sont dispersés dans une matrice de sédiments fins. Ce sont des argiles à blocaux qui donneront naissance une fois consolidées aux tillites (Diamictites). L'environnement glaciaire ancien se reconnaît par une morphologie conférant au paysage un aspect particulier caractéristique, dite morphologie glaciaire : profil en auge (ou en U) des vallées, surfaces striées, roches moutonnées, etc.

 

2.3.1.4. Sédimentation éolienne

 

Le sédiment éolien consiste surtout en sable dont les dimensions des grains varient entre 0,063 à 2mrn. La fraction argileuse et les micas ont été vannés. Les particules accusent un façonnement caractéristique : les grains sont ronds et mats, les galets présentent des facettes. Le classement est toujours bon. La structure est constituée par d'épais faisceaux de lamines obliques concaves vers le ciel. Les constructions ou édifices éoliens anciens sont des dunes et des ripple-marks, ces derniers pouvant se former sur la surface des dunes. Parmi les sédiments éoliens anciens (quaternaires), on note le lœss résultant de l'accumulation de fines poussières véhiculées par le vent sur de grandes distances. Ces dépôts sont dépourvus de litage et le diamètre des particules varie entre 0,015 – 0,045mm.

 

2.3.2. Milieu marin

 

Les océans occupent environ les trois quarts de la surface du globe. C'est dire combien les océans et les mers constituent les milieux de dépôt les plus importants du globe et méritent de ce fait une attention particulière. Ces milieux comportent une grande diversité des environnements qui résulte essentiellement des variations affectant à la fois la profondeur et la turbulence des nappes d'eau. Ils ont en commun plusieurs caractères qui les distinguent des milieux continentaux. Il s'agit de :

 

ü La présence d'une faune ou d'une flore marine diversifiée ;

ü L'absence des figures d'émersion (sauf dans la zone intertidale ou intercotidale = Estran) ;

ü La constance des paléosalinités (sauf dans les lagunes) ;

ü La prédominance des sédiments chimiques et biochimiques (surtout calcaires) sur les sédiments détritiques ;

ü L'extension horizontale des bancs formés sous une nappe d'eau permanente et étendue ;

ü La rareté des couleurs rouges dues aux oxydes et hydroxydes ferriques.

 

2.3.2.1. Morphologie du fond marin

 

Les principales unités sont : le plateau continental, le talus continental auquel est souvent associé le glacis et enfin les grands fonds (plaines et fosses océaniques).

 

 

 

4.000m

5.000m

 

 

 

Fig. 12 : La morphologie du fond marin

 

2.3.2.2. Sédimentation marine sur le littoral et le plateau continental

 

1° Zone intertidale ou estran (intercotidale)

 

La zone intertidale représente la frange côtière soumise au rythme des marées (tidal flat). II s'agit d'un milieu de haute énergie hydrodynamique où les dépôts sont l'objet de remaniements incessants. Le taux de sédimentation y est élevé. Les indices d'émersion sont fréquents.

 

ü La sédimentation consiste en sable et en vase à litage fin mais irrégulier ou oblique. Les rides de courant constituent les figures sédimentaires les plus communes. Dans la zone supralittorale généralement émergée se développent des fentes de dessiccation.   En climat aride une dolomitisation et une précipitation d'évaporites peuvent s'y produire. Les sédiments de cette zone obéissent à une zonation horizontale : plus vaseux dans les parties hautes, plus sableux dans les parties basses de l'estran. Ils sont fréquemment entaillés par des chenaux des marées à remplissage plus grossier et au litage oblique. Ce dernier enregistre l’inversion du sens des courants de marée.

 

ü La faune et la flore : La faune se compose d'un grand nombre d'organismes fouisseurs responsables de nombreuses galeries verticales et d'une intense bioturbation ; de pelotes fécales, d'algues (responsables de constructions stromatolitiques). A cette faune peuvent s'associer des végétaux supérieurs tels que les mangroves (pour le climat tropical).

 

2° Milieux néritiques.

 

La province néritique s'étend sur la plate-forme continentale et englobe actuellement un domaine dont la bathymétrie n'excède guère 200m. Elle coïncide avec la zone photique traversée par le rayonnement solaire et favorable à une activité photosynthétique. La faune y atteint son maximum de densité et de diversité. On note une grande variété des milieux néritiques étroitement contrôlés par la nature des apports sédimentaires et par la turbulence des eaux. On examinera successivement les milieux néritiques à sédimentation terrigène, les milieux néritiques à sédimentation calcaire et enfin les milieux récifaux.

 

a) Milieux néritiques à sédimentation terrigène

 

Le matériel détritique en provenance des continents est redistribué par les courants marins et par les vagues. A partir du niveau de base des vagues, ces dernières cessent leur action sur les particules. Ce niveau de base se situe généralement à des profondeurs inférieures à 30m. Plus près de la côte, c'est la zone d'agitation maximale due au fait que les vagues se brisent sur le fond. Ils s'y déposent des sédiments les plus grossiers sous forme des levés sous-aquatiques allongés et parallèles à la ligne du vague. Ce sont des barres ou cordons littoraux ou dunes hydrauliques.

 

ü Les sédiments : ce sont des sables et des débris d'organismes marins constituant les barres littorales caractérisées par un très bon classement et des grains bien arrondis. Vers le large on passe progressivement à des dépôts vaseux formés d'argiles et de sables fins. Au sein des barres littorales le litage est oblique et la stratification de type tabulaire. Les vases du large sont caractérisés par un fin litage horizontal pouvant être affecté par la bioturbation ou la perturbation due aux grandes tempêtes. Aux barres littorales et aux vases du large peuvent s'ajouter vers le rivage des dépôts de lagunes ou de zone intertidale et finalement sédiments intercontinentaux.

ü Les organismes : si les barres littorales sont riches en organismes benthiques, le large connaît une abondante endofaune.

 

b) Milieux néritiques à sédimentation calcaire

 

Les apports terrigènes se faisant de plus en plus faibles ou rares, le plateau continental devient le siège d'une sédimentation carbonatée. En rapport avec la bathymétrie on peut distinguer, du large vers la côte, trois environnements (Fig. 13) :

 

ü Au large se développe un milieu de faible énergie qui favorise le dépôt d'une vase calcaire (micrite) finement litée. La faune consiste surtout en organismes pélagiques et la glauconite est le minéral qui peut s'y développer.

ü Au-dessus du niveau de base des vagues (barre) se maintient un milieu de haute d'énergie hydrodynamique où les particules fines sont évacuées. Il en résulte un sédiment grossier, bien classé, riche en débris squelettiques (calcarénite), qui s'accumule sous forme de barre. Le litage est oblique. Ces conditions sont favorables à la formation des oolithes et à l’installation des récifs. La faune est essentiellement constituée des foraminifères benthiques.

ü Entre la barre et le rivage se situe une nappe d'eau plus calme et peu profonde. C'est le domaine de la lagune. La faune y est pauvre et les sédiments sont fins : une vase calcaire riche en pelotes fécales et, éventuellement, de la dolomie et des évaporites.

 

 

 

 

 

 

 

 

Fig. 13 : Caractérisation des milieux néritiques à sédimentation carbonatée

 

c) Milieux récifaux

 

Ce sont des formations ou constructions calcaires qui résultent de l'activité d'organismes fixés dont les squelettes s'accroissant sur place donnent naissance à des édifices résistant aux actions mécaniques.

 

ü Les sédiments : on distingue d'après le mode de gisement : (1) les biohermes qui forment des dômes massifs au sein des sédiments encaissant de lithologies différentes, (2) les biostromes qui se présentent sous l'aspect des boues litées d'épaisseur plus ou moins constante.

 

ü Les organismes : Le milieu récifal est un milieu favorable à la prolifération d'êtres vivants. On notera notamment le développement d'organismes constructeurs tels que les algues encroutantes, les archaeocyathidés, les spongiaires, les cœlentérés, les bryozoaires, les serpulidés, les lamellibranches,... On observe également à côté des organismes constructeurs la présence d'une faune subrécifale formée d’être fixés ou libres qui vivent au sein du récif : algues calcaires, brachiopodes, lamellibranches, échinodermes, …

ü Les conditions de l‘environnement récifal (actuel) :

 

    Une température supérieure à 18°C,

    Une salinité normale et constante,

    Une bathymétrie inférieure à 40m (C’est pratiquement la zone euphotique),

    Des eaux limpides et agitées.

 

2.3.2.3. Sédimentation dans le domaine océanique

 

Le domaine océanique s’étend loin des côtes sur le talus continental et les plaines abyssales. La sédimentation s’effectue sous une épaisse frange d’eau.

 

1° Talus continental et glacis.

 

Le talus continental également appelé pente continentale est le plan incliné qui raccorde la terrasse d'une plate-forme aux fonds océaniques, il peut présenter divers aspects : c'est une pente parfois en gradins, parfois en falaises abruptes, sa continuité n'est pas absolue, elle est interrompue par des collines, des crêtes, des plateaux intermédiaires. Elle est très souvent entaillée par des canyons sous-marins. Le glacis est marqué par une accumulation de sédiments, c'est là que l’épaisseur atteint son maximum.

 

La charge, constituée de boues et de sables terrigènes (80-50%), de roches et des graviers (10%), de coquilles et vases organiques (5%), peut provoquer une légère subsidence. Les épaisseurs sont d’ailleurs irrégulières. Le talus et le glacis sont le siège de certains phénomènes ou mécanismes qu'on appelle courants de turbidité ou mieux courants de fond denses. Ces courants peuvent avoir comme origine, les tremblements de terre, les rivières boueuses coulant au fond de la mer déclenchées pendant la saison de pluie.

 

2° Plaines et fosses océaniques

 

Ce sont des aires profondes qui s’étalent aux pieds des talus et glacis constituées de plateaux et de bassins.

 

a) Les sédiments

 

Dans les zones profondes des océans, les sédiments sont mis en place par deux mécanismes bien distincts. Du matériel détritique en provenance des régions côtières peut être disposé dans les plaines abyssales par l’intermédiaire de courants de turbidité mis en mouvement le long du talus continental. Ils apportent dans le domaine océanique un matériel allochtone. Ce matériel, assez inégalement réparti sur le fond des océans, est de plus en plus épais à mesure que l'on s'approche du glacis.

 

Loin de toute influence terrigène, en l’absence de courants, la décantation lente des particules fines et de tests des micro-organismes alimentent de fond des océans en boues pélagiques. Ces sédiments peuvent être calcaires, argileux ou siliceux. Ils sont à l’origine des calcaires fins noduleux souvent colorés en rouge, des marnes et des radiolarites, ces derniers étant souvent associés à des éruptions volcaniques sous-marines. La présence des concentrations métalliques telles que les nodules de manganèse y est notable.

 

b) La faune

 

Les sédiments transportés par le courant de turbidité renfermant une faune allochtone originaire d'eaux peu profondes. Elle présente des indices de remaniement. Les boues pélagiques sont constituées pour une grande part par les tests d'organismes planctoniques : coques calcaires de flagellés (coccolithophoridés) et les foraminifères (de genre globigérines), coquille calcaire des mollusques (ptéropodes), squelette siliceux de diatomées ou de radiolaires. Le benthos est rare et la flore absente car les fonds sont situés bien au-dessous de la zone photique.

 

2.3.3. Milieux mixtes

 

2.3.3.1. Deltas et estuaires

 

Les fleuves se jettent dans la mer soit par des estuaires, soit par des deltas. Au contact d'une nappe d'eau étendue (mer ou lac), les eaux des rivières sont freinées, perdent de leur vitesse et abandonnent leur charge sédimentaire. Si les matériaux apportés par les fleuves sont en partie évacués en mer laissant libre un chenal, c'est un estuaire. Si, au contraire, le courant fluvial n'est pas assez puissant pour entraîner les matériaux, un delta qui se met en placé.

 

 

 

 

 

1° Deltas

 

Les deltas sont des domaines de sédimentation active, Leur configuration dépendra d'une part de l’importance des apports fluviatiles et d'autre part de la capacité de redistribution de ce matériel par les vagues et par les courants marins ou lacustres. Les grands deltas se forment toujours dans des mers à faible marées et où la force moyenne des vagues n’est pas trop grande pour disperser immédiatement les matériaux déposés. Les chenaux forment des méandres et abandonnent les bras morts car la pente du lit s’affaiblit. Plus à l’aval, les chenaux érigent des levées naturelles à partir des matériaux transportés. Celles-ci sont vite rompues et un nouveau trajet est emprunté. Ainsi s'édifie une plate-forme deltaïque. Elle est en partie immergée.

 

Plus au large après la rupture des pentes qui correspondent au talus deltaïque, les dépôts passent aux sédiments fins de la nappe d’eau marine ou lacustre. Cette aire de sédimentation est appelée le prodelta. Avec le temps la partie active du delta peut se déplacer. Alors naissent des bras morts, des étangs, des marais et des lagunes. Les vagues et les courants peuvent démanteler l'édifice deltaïque et l'embouchure peut ensuite évoluer en estuaire.

 

a) Les sédiments.

 

ü Dans la partie proximale du delta se déposent les sédiments les plus grossiers. Il s'agit d'alluvions remplissant des chenaux. Elles présentent les caractères de dépôts fluviatiles. L'ensemble de ces dépôts de la partie émergée du delta constitue des couches sommitales (topset beds).

ü Dans la partie distale immergée du delta, les sédiments s'accumulent sur de grandes épaisseurs faisant progresser le talus deltaïque vers le large (foreset beds). Les sédiments sont constitués de sable grossier et de sable fin riches en débris végétaux. Les argiles sont en grande partie évacuées par les vagues. La stratification est oblique et arquée. Entre ces zones de dépôt actif s'effectue une sédimentation plus fine.

ü Dans le prodelta, les vases enrichies en matière organique présentent un litage horizontal fréquemment bioturbé (bottomset beds). La séquence sédimentaire montre une granodécroissance verticale.

 

 

b) Les organismes

 

Dans la partie émergée ou subaérienne du delta parsemée de nombreuses étendues d'eau douce se développent des organismes aussi bien aquatiques que terrestres ainsi qu'une abondante végétation dont les systèmes radiculaires peuvent se fossiliser et donner naissance à des futurs gisements de charbon ou des lignites.

 

Dans la partie immergée la faune sera caractéristique des milieux saumâtres parmi lesquels peuvent s'installer les organismes fouisseurs responsables d'une intense bioturbation des dépôts.

 

Plus au large se développe une faune benthique dans les vases du delta où dominent les formes fouisseuses et quelques restes d'organismes pélagiques.

 

2° Estuaires

 

Comme nous l’avons vu, un estuaire est formé par l'embouchure élargie d'une rivière ou d'un fleuve. C'est un bras de mer qui pénètre dans une terre et qui est soumis à l’influence des marées et des courants. L'estuaire présente de ce fait de nombreux traits communs avec la zone intertidale.

 

Les sédiments généralement fins sont constitués de sables fins localisés dans les chenaux d'une part et de vase qui se dépose aux berges d'autre part. Cette vase peut être remaniée à l'état des galets mous conduisant à des véritables conglomérats intraformationnels.

 

La faune consiste essentiellement en espèces relayées vers l'amont par des espèces d'eau douce et faune marine.

 

2.3.3.2. Lagunes

 

Les lagunes sont des étendues d'eau en communication temporaire ou permanente avec la mer dont elles sont séparées par une barrière naturelle. Cette situation crée un milieu de faible énergie hydrodynamique qui, évoluant dans une tranche d'eau peu épaisse est responsable d'une grande variabilité des facteurs physico-chimiques : température, salinité, oxygénation,...

 

Les sédiments : consistent en sables et vases fins, à litage horizontal souvent bioturbé et riches en matière organique (pelotes fécales). La présence de ripple-marks est fréquente. Lorsque les apports terrigènes sont peu importants, la précipitation de carbonates devient le phénomène prépondérant (micrite) et en climat aride peut s'amorcer le dépôt des évaporites.

 

Les organismes : Très pauvre en organismes, l'environnement lagunaire présente, suivant le cas, une faune marine, ou plus fréquemment, typique des eaux saumâtres (mollusques, crustacés, insectes). Les organismes fouisseurs sont abondants. Les dépôts lagunaires peuvent devenir azoïques par suite de la disparition des organismes causée par une salinité trop élevée. Cette condition est due à l'échauffement des eaux, au confinement, à l’assèchement...

 

L’envasement progressif de la lagune favorise l'installation de la végétation, c'est le cas de la mangrove qui colonise les rivages des régions de basse latitude.

 

2.3.3.3. Milieux de dépôt des évaporites

 

Les dépôts salins (sel gemme, gypse, sylvine,...) peuvent se former dans des sites en relation avec le milieu marin ou sur le continent. Deux conditions ont présidé à leur formation: un climat aride responsable d'une forte évaporation d'une part et une forte réduction des apports détritiques. La bathymétrie de la nappe n'est pas déterminante pour leur genèse. Plusieurs mécanismes peuvent expliquer la précipitation et l'accumulation des évaporites et caractériser ainsi différents milieux de leur dépôt tels que les lagunes, les grandes plates-formes marines et les précipitations au sein des sédiments.

 

1° Lagunes

 

Sur le littoral, la haute mer peut être séparée de la lagune par une barre. Une évaporation intense provoque la concentration des eaux. Leur densité s'accroît et elles peuvent alors s'accumuler dans les points bas de la lagune où les sels précipitent (Fig. 14). Le renouvellement de la tranche d'eau superficielle à partir de la mer permet au mécanisme de s'entretenir durant des longues périodes.

 

 

Fig. 14 : Précipitations salines dans une lagune

 

2° Grandes plates-formes marines

 

Le mécanisme de la précipitation de sel est ici assez proche de celui évoqué pour les lagunes. Cependant le courant de retour des eaux chargées en sel n'est pas freiné par un obstacle physique qui est en fait la barre mais par un obstacle dynamique. En effet, la différence de densité des eaux, les frottements au niveau des interfaces des fluides, etc., entravent le brassage des eaux et le retour des saumures sursalées. Sur la plate-forme marine s’opère alors un gradient de salinité des régions les plus proches de la mer ouverte où se déposent les sels les moins solubles (gypse) aux zones plus continentales où précipitent les sels les plus solubles (sel gemme et parfois potasse). Les dépôts salins correspondant à ces deux mécanismes sont épais et bien lités. Ils sont souvent associés à des dolomies. Leur extension horizontale est grande et sont normalement azoïques.

 

3° Précipitations au sein des sédiments

 

Les sels originellement contenus dans l'eau d'imbibition de vases marines peuvent cristalliser tardivement après leur enfouissement. Les évaporites forment alors des poches irrégulières ou des cristaux isolés (Ex. les salines de Mwashya au Katanga dans le Katanguien au sommet du Roan). Dans la zone supralittorale, la dolomite, l'anhydrite, le gypse ou le sel gemme peuvent naître dans le sédiment à la suite de remplacements diagénétiques.

 

L'approvisionnement en saumures est assuré par les remontées capillaires et par des inondations temporaires. De telles formations évaporitiques sont de faible importance dans la nature actuelle mais auraient été identifiés dans plusieurs formations anciennes.

2.3.3.4. Courants de turbidité

 

Comme nous l'avons déjà vu lors de l'étude de la sédimentation sur le talus continental, les courants de turbidité sont des courants de densité, riche en matériel en suspension, qui s'écoulent sous l'effet de la gravité et étalent leur charge sédimentaire dans les zones profondes des bassins. Il s'agit d’un phénomène rapide se produisant à proximité d'une pente sous aquatique à la suite d'une rupture d'équilibre qui met en mouvement une masse importante des sédiments. Au cours de l'écoulement, l'ensemble Se transforme en une masse boueuse plus dense que l'eau ambiante capable d'éroder le substratum. Au fur et à mesure que le courant se ralentit sa capacité de transport diminue et les particules se déposent en ordre de tailles décroissantes. Il se produit alors une granodécroissance à la fois verticale et horizontale. Le dépôt correspondant est désigné par le terme turbidite.

 

1° Sédiments

 

Une turbidite représente une séquence sédimentaire dont la base correspond à une surface de ravinement soulignée par un riche cortège de figures sédimentaires. Les turbidites sont caractérisées par :

 

ü Une granodécroissance verticale bien marquée,

ü Des grains grossiers noyés dans une matrice des particules fines,

ü Des lamines à surfaces planes et parallèles,

ü Passage progressif du sommet aux dépôts de décantation de la sédimentation autochtone qui correspond au « bruit de fond », de Lombard,

ü Une grande extension horizontale,

ü Passage des sédiments grossiers à strates épaisses et irrégulières à des sédiments fins à lamines minces.

 

2° Organismes.

 

Présence d'une faune benthique, la frange pélitique contient des tests d'espèces planctoniques (foraminifères, diatomées, radiolaires,...) et des restes d'animaux pélagiques.

DEUXIEME PARTIE : PETROLOGIE DES ROCHES EXOGENES

 

 

CHAPITRE III. SEDIMENT

 

 

L'étude des sédiments peut apporter des renseignements sur l'origine du matériel, sur les conditions de son transport et sur les caractères du milieu de dépôt. Les observations se situent à différents niveaux :

 

ü Au niveau des particules sédimentaires, ce qui relève de la pétrographie sédimentaire ;

ü Au niveau du banc, ce qui relève de la stratonomie ;

ü Au niveau de l’affleurement, on arrive ici à l’analyse séquentielle.

 

3.1. PETROGRAPHIE SEDIMENTAIRE

 

3.1.1. Caractères pétrographiques du sédiment

 

Ils permettent de recueillir les renseignements sur le domaine situé en amont des aires de dépôt ainsi que sur l'évolution diagénétique.

 

3.1.1.1. Domaines situés en amont des aires de dépôt

 

1° Aires nourricières

 

Les sédiments détritiques ont été acheminés à partir des zones proches ou lointaines soumises à l'érosion. Leur composition minéralogique et surtout la présence des galets ayant résisté au transport peuvent renseigner sur la nature géologique des aires nourricières. D'après les affleurements actuels ou les données de sondage, il devient alors possible de localiser celles-ci géographiquement.

 

Les aires nourricières peuvent également être repérées par l'étude des minéraux lourds : staurotide, disthène, andalousite, grenat, tourmaline, zircon, etc. Ces minéraux caractérisent les différentes zones de métamorphisme dans les massifs anciens.

 

2° Climats.

 

On sait depuis le siècle dernier que les mécanismes physico-chimiques qui commandent les altérations sont influencés par le climat notamment la température et l’humidité. Ainsi :

 

ü En climat tempéré : les roches cristallines donnent des arènes où les minéraux disjoints, partiellement altérés, sont garnis d'une matrice argileuse peu abondante. Le quartz demeure plus ou moins intact. Après induration les arènes conduisent à des arkoses.

ü Sous un climat intertropical chaud et humide les mêmes roches subiront l'hydrolyse poussée, la silice est en partie évacuée en solution. L'aluminium est maintenu en surface Sous forme de gibbsite ou se combine à la silice restante pour donner la kaolinite. La majeure partie du fer se fixe dans les concrétions et les cuirasses. On aboutit à des accumulations latéritiques. On sait par ailleurs que tous les minéraux ne s'altèrent pas avec la même rapidité (la biotite s'altère plus rapidement que la muscovite ; le plagioclase plus que les feldspaths alcalins,...).

 

3.1.1.2. Milieu de dépôt

 

1° Potentiel d'oxydo-réduction

 

Certains minéraux de fer nés dans les milieux de dépôt peuvent servir comme indicateurs des conditions oxydantes et réductrices régnant dans le sédiment. Les oxydes ferriques comme la goethite FeO(OH) indique un milieu oxydant, la sidérite FeCO3 et la pyrite, au contraire, caractérisent des milieux réducteurs. Ceux-ci sont également favorables à la conservation de la matière organique et par conséquent à la fossilisation des parties molles des organismes.

 

2° Salinité

 

Il existe des minéraux qui prennent uniquement naissance dans les sédiments marins. C'est le cas de la glauconite et la berthiérine ou la chamosite (phyllites ferrifères), de phosphates et des évaporites, etc. La dolomie primaire (à cristaux fins et à litage régulier) semble également caractériser un milieu à forte salinité de tendance évaporitique, donc un environnement marin. Les pseudomorphoses peuvent également caractériser un environnement salé. En effet, ces éléments sont très mobiles et migrent facilement, il s'ensuit que les cavités qui en résultent dans les roches sont occupées par d’autres minéraux.

 

3° Enseignements des minéraux argileux

 

Dans un dépôt détritique, les minéraux argileux sont hérités des aires nourricières. Quelques exemples : Illite et chlorite proviennent des massifs en voies d’érosion ; la kaolinite et la montmorillonite proviennent d’un terrain aplani et couvert de sol riche en ces minéraux ; la glauconite provient du milieu marin.

 

3.1.1.3. Évolution diagénétique

 

La diagenèse est responsable de l’aspect final du sédiment. En effet, les modifications et les réarrangements géochimiques qui se produisent dans le sédiment après son dépôt peuvent renseigner directement sur le degré de son évolution diagénétique. Exemple : nourrissage de grains par des solutions riches en ions ; formation de concrétions, etc.

 

3.1.2. Morphoscopie

 

L'analyse morphoscopique étudie la forme et l’aspect de des grains et des galets. Elle permet d'évaluer l’importance de l’usure provoquée par l'agent de transport et peut renseigner sur la nature de celui-ci.

 

3.1.2.1. Aspect de la surface des grains de quartz

 

L'observation se fait sur des grains secs de diamètre supérieur à 0,5mm. On distingue trois catégories de grains :

 

ü Grains non usés : transport faible ou nul ;

ü Grains émoussés luisants : transport par l'eau ;

ü Grains ronds mats : transport par le vent.

 

Exemple : Dans un sédiment ;

ü Si les grains émoussés luisants représentent plus de 30%, le milieu est marin ;

ü Si c'est inférieur à 20%, il y a doute sur la nature du milieu (fluviatile ou marin ??).

N.B. : Le MEB (microscope électrique à balayage) est utilisé pour une morphologie détaillée.

 

3.1.2.2. Forme et arrondi des galets

 

La forme des galets dépend de leur nature pétrographique mais également de l’agent d'usure. Ainsi :

 

ü En milieu marin : galets bien émoussés avec aplatissement plus accusé qu'en milieu fluviatile ;

ü Le transport par le vent chargé en particules : surfaces planes à facettes séparées par des arêtes (windkanters ou dreikanters) ;

ü Le transport par le glacier : galets striés.

 

3.1.3. Granulométrie

 

Elle consiste en la mesure de la taille des particules, soit directement c’est le cas des galets, soit à l’aide d'un tamis décantation pour des sédiments fins (˂ 0,05mm) ; ici la vitesse de sédimentation est fonction de la taille du grain.

 

3.1.3.1. Roches détritiques

 

La taille moyenne des particules détritiques et l’étalement des classes granulométriques dépendent essentiellement de la compétence de ‘agent de transport et de sa nature. Les représentations graphiques (courbes de fréquence, courbes cumulatives) permettent de mieux visualiser le résultat et de calculer des coefficients pour la comparaison entre les différents faciès.

 

 

Fig. 14 : Courbes de fréquence

 

Sur les courbes de fréquences on peut lire :

 

ü Le degré de classement des grains d'après la largeur de la courbe ;

ü L'origine monogénique ou polygénique du sédiment selon que la courbe présente un ou plusieurs maxima ;

ü L'élimination d'une fraction du matériel détritique grâce à l'asymétrie de la courbe.

 

Lorsque le sédiment est composé en général des sédiments fins, on parle d’asymétrie positive, tandis que lorsque les sédiments sont grossiers, on parle d’asymétrie négative.

 

N.B.: Les sables de dunes sont en général mieux classés que les sables fluviatiles. D’autre part les sables de plage marine sont pauvres en particules fines entraînées vers le large (l’asymétrie négative), alors qu’elles constituent les classes dominantes en milieu fluviatile ou éolien (l'asymétrie positive).

 

Les différents minéraux des roches se caractérisent également par leur résistance à l'usure : les feldspaths aisément clivables sont moins résistants que les grains de quartz.

A partir de la roche-mère soumise à l'altération Folk a défini quatre étapes dans les transformations subies par le sédiment au cours de son histoire

 

ü Un stade d’immaturité caractérisé par un sédiment riche en argile et en fins micas, les grosses particules sont anguleuses et mal classées ;

ü Un stade submature où la fraction argileuse a été en grande partie évacuée, les grains de la roche sont encore anguleux et mal classés ;

ü Un stade de maturité atteint lorsque les argiles ont été éliminées, les particules sédimentaires sont bien classées mais demeurent subanguleuses ;

ü Un stade de supermaturité, terme ultime de l'évolution de sédiment où les grains sont bien classés et bien arrondis, il n'y a plus d'argiles.

 

Selon l'énergie hydrodynamique à laquelle il est soumis, le matériel sédimentaire atteindra l'un ou l'autre stade d'évolution.

 

 

Fig. 15 : Différents stades de maturité d'un sédiment détritique en fonction de l'énergie disponible au cours de ses déplacements (R. Folk, 1951).

3.1.3.2. Roches carbonatées

 

Les carbonates sont transportés soit à l'état d'éléments figurés soit en solution. Dans le premier cas, leur comportement et leurs caractères seront ceux des particules détritiques; dans le second cas, leur dépôt s'effectuera par précipitation chimique ou par l’intermédiaire d'organismes vivants. D'après la taille des cristaux de calcite, on distingue classiquement :

 

ü La micrite dont les éléments ont toujours moins de 10 µm de diamètre, elle provient du dépôt d'une boue carbonatée d'origine chimique ou mécanique ; elle est donc l’indice d'un milieu calme dépourvu de courant. La micrite est le constituant fondamental des calcaires lithographiques.

 

ü La sparite formée par les cristaux limpides de plus grande taille (>10 µm) ayant précipité dans les espaces qui séparent les éléments figurés. Ce ciment carbonaté se développe lorsque la micrite n'occupe pas le vide intergranulaire, sa présence implique un milieu de dépôt agité. Cependant, la sparite peut également se former par cristallisation des particules plus petites.

 

D’une manière générale les sédiments détritiques apportent des informations sur les aires nourricières et sur leur mode de transport tandis que les roches d'origine chimique ou organique renseignent d’avantage sur le caractère du milieu de sédimentation.

 

 

Fig. 16 : A - Calcaire oolithique (calcarénite) et B - Craie (calcilutite)

 

3.1.4. Disposition des particules

 

3.1.4.1. Granoclassement

 

Lorsque l’énergie de l'agent de transport diminue progressivement, les particules se déposent par ordre de tailles décroissantes : il s'opère un granoclassement. Dans ce cas précis il y aura granodécroissance verticale. Si au contraire l'énergie s'accroît au cours du temps, il en résultera une granocroissance. Le granoclassement peut être vertical ou horizontal.

 

Fréquemment, il se repère à l'œil nu par une différence des couleurs de la roche : le terme grossier est plus claire que le terme fin enrichi en argile et en matière organique. Le granoclassement est bien exprimé en milieu aquatique. Par contre, les dépôts glaciaires sont caractérisés par un mauvais classement lié à la faible viscosité de la glace. C'est le cas des argiles à blocaux : matériels déposés en vrac lors de la fonte dont les équivalents géologiques sont qualifiés de Tillite ou Diamictite (mixtite).

 

3.1.4.2. Linéation de délit

 

La linéation de délit s'observe à la surface des plans de litage des grès sous forme des esquilles allongées dont les grands axes sont parfaitement parallèles entre eux (Fig. 17). Cet écaillage résulte de l'orientation et de la ségrégation des particules lors du dépôt. Il n'apparaît que dans un milieu de haute énergie hydrodynamique.

 

 

Fig. 17 : Linéation de délit à la surface d'une dalle de grès.

 

3.1.4.3. Orientation et l'imbrication des galets

 

Les galets allongés s'orientent sous l'action des courants. Sur les plages, les grands axes des galets s'alignent parallèlement aux rivages par suite du mouvement des vagues. En milieu fluviatile, les grands axes de galets ont tendance, suivant le cas, à se disposer parallèlement ou perpendiculairement à la direction des écoulements. Les galets de forme irrégulière s'ancrent dans le sédiment par leur extrémité la plus grosse ; la partie effilée est alors orientée vers l'aval.

 

Lorsque les galets plats sont mis en place par un courant unidirectionnel, ils se disposent comme les tuiles d'un toit : leur grand axe plonge vers l'amont (Fig. 18). Cette disposition est caractéristique de sédiment fluviatile.

 

 

Fig. 18 : Imbrication de galets

 

3.2. STRATONOMIE

 

3.2.1. Stratification et le litage

 

ü La stratification : c'est une disposition en couche, banc ou strate de dépôts sédimentaires. Les couches sont séparées les unes des autres par des joints de stratification ou par des interstrates de lithologie différente.

ü Le litage se rapporte aux structures géométriques apparentes à l'intérieure de bancs, produites au cours de leur dépôt.

 

3.2.1.1. Stratifications

 

D’après leurs géométries, on distingue :

 

ü Les stratifications planes et parallèles : ce sont des surfaces planes et parallèles de dépôts à grande extension horizontale de l'ordre de km voire dizaine de km, formées sous des nappes d'eau de grande extension horizontale : mers, lacs, …

 

ü Les stratifications lenticulaires : chaque banc correspond à une lentille de quelques décimètres à de dizaines de mètres de largeur, ce sont de dépôts étroitement localisés dans l'espace : remplissages des dépressions ou des chenaux, dunes, récifs, etc.

 

 

3.2.1.2. Litage

 

C’est une succession de feuillets sédimentaires d'épaisseur millimétrique qualifiés de lamines. Au sein des bancs, le groupement des lamines conduit à différentes formes de litage. On distingue :

 

ü Le litage horizontal :

 

    Dans un sédiment fin, il se produit par décantation des particules. Il est l'indice d'un milieu calme.

    Dans un sédiment grossier (grès par exemple), il apparaît sous l’action de courants. Il est le témoin d’un milieu de haute énergie hydrodynamique.

 

ü Le litage oblique : il indique l'action d'un courant unidirectionnel et révèle le sens et la direction des courants. Ce litage constitue la structure interne des édifices sédimentaires tels que les ripple-marks, les dunes, les barres fluviatiles.

 

Fig. 19 : Litages horizontale (a) et oblique (b)

 

ü Le litage déformé : peu après leur dépôt, des groupes de lamine peuvent entrer en mouvement le long d'une pente. Leur plissement provoque une succession d'ondulations plus ou moins irrégulières entre des niveaux moins plastiques demeurés horizontaux. Ces microplis synsédimentaires (convolute bedding) se produisent dans des sédiments fins encore gorgés d'eau, c'est-à-dire déposés rapidement.

 

Fig. 20 : Litage déformé

3.2.2. Figures sédimentaires

 

Ce sont des éléments géométriques de petites dimensions, étroitement localisées sur les surfaces ou dans la masse des bancs. Elles résultent de l’action dynamique des fluides (eau, vent).

 

3.2.2.1. Figures du toit des bancs

 

1° Ripple-marks (rides)

 

Ce sont des ondulations répétées rythmiquement qui se développent à la surface des sédiments meubles sous l'effet des courants ou de la houle. La distance entre deux crêtes ou longueur d'onde varie de quelques centimètres (ripple-marks) à plusieurs dizaines de mètres (dunes). On distingue :

 

ü Les rides d’oscillation ou rides à profil symétrique (Fig. 21) : elles naissent sous l’effet des mouvements oscillatoires ou de la houle.

ü Les rides de courant ou rides à profil asymétrique (Fig. 22) : elles sont liées au transport des particules sédimentaires. Elles sont l’effet d’un courant unidirectionnel et les crêtes sont perpendiculaires à la direction du courant. Ces rides renseignent sur la direction et le sens des paléocourants, la bathymétrie n'est pas définie.

 

N.B. : Les ripple-marks d'origine éolienne se distinguent des ripple-marks sous-aquatiques par la présence des particules grossières sur les crêtes pour les premiers et dans les vallées pour les derniers.

 

Fig. 21 : Eléments d’une ride symétrique

 

Fig. 22 : Eléments d’une ride asymétrique

 

2° Cupules en croissant

 

Ce sont de dépressions en forme de fer à cheval qui se forment en amont d’un petit obstacle (galet, coquille) contre lequel bute le courant. La concavité de la figure indique l’aval.

 

Fig. 23 : Cupule en croissant (crescent mark) (Reineck et Shingh, 1975)

 

3.2.2.2. Figures du mur des bancs

 

Elles correspondent aux moulages naturels (casts) de dépressions ou de reliefs développés dans le banc sous-jacent de granulométrie plus fine. On distingue :

 

1° Figures renseignant sur les caractères physico-chimiques des niveaux sous-jacents.

 

ü Les fentes de dessiccation : Elle donne la preuve d’un assèchement du milieu aquatique ;

ü Les pseudomorphoses de sel gemme qui correspondent au remplissage des cavités imprimées à la surface du sédiment par la cristallisation de sel gemme après la dissolution de ces cristaux. Elles sont l’indice d’une forte salinité des eaux.

 

2° Figures dues aux courants

 

ü Les figures d’affouillement : ce sont de dépressions creusées par un courant dans le sédiment encore meuble (Ex. les flute-marks) (Fig. 24).

ü Les figures provoquées par des objets (tool-marks) : ils sont transportés par le courant et varient selon la forme de l’objet et suivant son angle d’impact (Ex. Les cannelures d’érosion ou groove-marks). Ces figures indiquent la direction du courant et non son sens (Fig. 25).

ü Les figures de déformations (Ex. Les figures de surcharge ou load casts), pseudo-nodules, …

 

 

Fig. 24 : Figure d’affouillement dans un grès fin (flute-marks),

 

Fig. 25 : Figures provoquées ou laissées par des objets (Toot marks) (Reineck et Shingh, 1975)

 

3.2.2.3. Figures observables au sein des bancs

 

On peut noter :

 

ü Les figures dues à l’orientation de particules (Ex. linéation de délit) ;

ü Les figures dues à. la déformation des lamines (Ex. microplis synsédimentaires (cfr. fig. 20), pseudonodules, etc.) ;

ü Les figures d'origine diagénétique (Ex. les concrétions : ici la relation avec l’environnement initial est difficile à établir), les stylolites.

 

3.3. ANALYSE SEQUENTIELLE

 

Dans une série géologique la mise en évidence des séquences ou les différents termes qui les composent se suivent sans discontinuité majeure dans un ordre précis, parfois répétés rythmiquement conduit à une meilleure compréhension du mécanisme de la sédimentation.

 

3.3.1. Série virtuelle

 

Elle donne la succession des dépôts qu'on rencontrerait normalement dans un bassin de sédimentation situé au voisinage des reliefs vigoureux soumis à une érosion progressive. Elle comprend les termes suivants :

 

a.

Les résidus insolubles grossiers (galets, sable) : ce sont les produits d’une érosion mécanique d’un relief.

 

Sédiments détritiques

b.

Les hydrolysats : correspondant à la fraction fine argileuse, ils sont le résultat de rivières au cours lent sur le relief.

 

c.

Les oxydats : minerais de fer et de manganèse d’origine sédimentaire. Ils indiquent une pénéplanation croissante des  reliefs.

 

Sédiments

chimiques

d.

Les Carbonates de calcium et de magnésium (Calcaire, dolomie).

 

e.

Les dépôts salins : Ils correspondent au terme ultime de l’aplanissement de relief.

 

 

3.3.2. Séquences lithologiques

 

Il est rare et difficile d'observer dans la nature la succession intégrale de cinq termes de la série virtuelle définie ci-dessus. Seuls des fragments de cette série se rencontrent au niveau des affleurements géologiques. Ce sont des séquences lithologiques.

 

a) Séquences positives et séquences négatives

 

ü Séquences positives : elles respectent l’ordre de la série virtuelle : cette évolution est caractéristique des transgressions.

ü Séquences négatives : dont les termes se suivent dans le sens inverse de la série virtuelle, elles caractérisent les conditions régressives de la sédimentation.

 

Fig.26 : Séquences lithologiques

 

b) Séquences d'origine pédologique

 

La théorie de la biorhexistasie (ERHART H., 1955) souligne le rôle de la forêt qui protège les sols de l’érosion et règle l'évacuation des produits de l'altération continentale.

 

ü En période de biostasie, la forêt joue un rôle de filtre : les particules insolubles restent sur place et seuls les produits solubles parviennent dans les bassins de sédimentation. Cette période est caractérisée par une stabilité suffisamment longue pour qu’un couvert forestier se développe. La forêt joue un rôle de filtre contrôlant la formation du sol et séparant : a) Une phase migratrice, emportée sous forme de solution, composée notamment de bicarbonates de Na, K, Ca, Mg et de silice hydratée ; b) Une phase résiduelle composée d’hydroxydes de Fe, d’Al et d’argiles (kaolinite surtout).

 

La sédimentation autour du continent a alors comme base la phase migratrice, et est donc chimique et biochimique, avec en particulier des calcaires, des dolomies, des silex,...

 

ü En période de rhexistasie, la destruction de la forêt libère les sédiments détritiques vers l'aval. Cette période est marquée par la destruction du couvert végétal pour une raison ou pour une autre (modification climatique, déformation tectonique, voire cause anthropique actuellement). L’érosion s’attaque alors au sol, et le déblaye, puis aux roches du sous-sol. La sédimentation correspondante est ainsi composée des éléments de la phase résiduelle remaniés donnant des argiles (pouvant être riches en kaolinite, en débris végétaux, et en matières organiques), puis par des dépôts plus grossièrement détritiques, sableux et calcareux, avec des conglomérats si les reliefs sont importants.

 

La succession de manière plus ou moins régulière de ces deux périodes engendre dans le bassin de sédimentation, des séquences négatives où l'on passe des termes chimiques aux termes détritiques.

 

3.3.3. Séries rythmiques

 

Certains sédiments sont constitués par des séquences se répétant un grand nombre de fois : ce sont des séries rythmiques ou récurrentes. Dans tous les cas l’origine de la rythmicité est à rechercher dans la récurrence des facteurs qui ont présidé à la sédimentation.

 

a) Les varves : ce sont des sédiments des lacs ou des mers périglaciaires. Elles sont formées de séquences millimétriques à deux termes :

 

ü Les dépôts sableux claires de crue de printemps pour les régions de hautes latitudes où de saison pluvieuse pour les régions tropicales ;

ü Les dépôts argileux plus foncés riches en matières organiques des pluies d'automne (régions de hautes latitudes) ou de saison sèche (régions tropicales).

 

Chaque séquence correspond exactement à une année. Cette sédimentation peut se rencontrer dans des bassins lacustres.

 

b) Les alternances des calcaires et des marnes : fréquemment dans les séries géologiques, ce type de dépôt est formé d'une succession de séquences à deux termes, les calcaires et les marnes. Ces dépôts sont connus dans la sédimentation ancienne des mers peu profondes du Trias et du Jurassique. Différents mécanismes peuvent expliquer ces alternances : le contrôle eustatique (HALLAND, 1961) ; l'écoulement par gravité (LOMBARD, 1972) ; les variations climatiques.

 

ü Le contrôle eustatique : Les variations périodiques du niveau de la mer conditionnent les alternances calcaire-marne. En effet, la précipitation de carbonate de calcium est maximale dans les eaux peu profondes où les conditions d'aération, de température et d'éclairement sont optimales et qu'en revanche la décantation des particules argileuses est favorisée par une tranche d'eau plus forte où l'agitation est moindre.

ü L'écoulement par gravité : Comme l’a montré HALLAM le carbonate s'accumule dans les eaux peu profondes, sous l'effet de la pesanteur se produit périodiquement une rupture d'équilibre et les dépôts sont mis en mouvement le long des pentes. Ils s'étalent en vastes nappes dans les parties basses du bassin de sédimentation. Au contraire, les particules argileuses se décantent d'une manière continue, formant le bruit de fond, de la sédimentation. Elle donne naissance aux interstrates marneuses.

ü Les variations climatiques : Il a été montré que l'alternance calcaire-marne s'opère dans un milieu calme où la sédimentation argileuse correspondrait à un phénomène continu, celui-ci étant périodiquement interrompu par une précipitation massive de carbonate de calcium. Les épisodes calcaires pourraient être rapportés à des phases de réchauffement climatique propice à la précipitation des carbonates.

ü L'origine diagénétique : Dans certains cas l'alternance des bancs calcaires et des bancs marneux peut provenir d'une mobilisation tardive de calcaire dans la phase originelle. Il en résulte des niveaux enrichis en calcaire d'aspect noduleux.

 

c) Les molasses : Ce sont des sédiments essentiellement détritiques provenant du démantèlement de reliefs nouvellement érigés. Elles sont liées à une phase tardive de l'orogenèse. Les roches sont souvent des grès à ciment calcaire, de texture immature. Les bancs, généralement lenticulaires, se sont déposés dans un milieu aquatique non permanent : chenaux fluviatiles, lacs, bras de mer peu profonds,... L'allure rythmique des dépôts peut être due à la divagation des cours d'eau sur la plaine alluviale lors des crues successives. Les séquences ou cyclothèmes comprennent idéalement de bas en haut grès granoclassés, des marnes, des calcaires et des charbons (Fig.27).

 

 

Fig. 27 : Cyclothème d’une molasse

 

d) Les Flyschs : sont constitués par des sédiments de remplissage de bassins subsidents formés durant la phase de comblement qui précède la surrection des chaînes de montagnes. Ils sont anté-orogéniques ou synorogéniques. Selon les rides attaquées par l’érosion, on peut avoir des flyschs gréseux, des flyschs calcaires, des flyschs argileux, etc.

 

Les sédiments, sont toujours pauvres en matières organiques. Les séquences souvent complexes et de grande extension horizontale sont caractérisées par des termes bien granoclassés accompagnés d'un vaste cortège de figures de courant: les grandes épaisseurs qui les caractérisent indiquent une sédimentation dans un milieu marin profond. Ils auraient été mis en place par des courants de turbidité ou courants de haute densité qui dévalent périodiquement les pentes sous-marines et étalent leur charge sédimentaire dans les points bas des bassins où s'opère un classement des particules.

 

Aussi ces dépôts sont-ils liés de préférence aux zones d’instabilité tectonique. Le terme inférieur (grossier) des séquences ravine les dépôts sous-jacents et renferme une faune remaniée et le terme supérieur en revanche est pélitique et représente le « bruit de fond » de la sédimentation avec des microfossiles autochtones et divers témoins d'activité biologique.

 

e) La Houille : Elle se forme dans les bassins subsidents lacustres ou marins généralement situés en bordure de chaînes en cours d'orogenèse. Les veines de charbons résultent de l'accumulation des restes végétaux en milieu subaérien. Les grès et les schistes associés se sont déposés sous une faible tranche d’eau. Les séquences d’extension horizontale réduite comprennent deux termes : les stériles (grès, schistes,...) et la veine de charbon. De nombreux mécanismes ont été évoqués pour expliquer la rythmicité de ce dépôt :

 

ü Subsidence à vitesse variable provoquant périodiquement la destruction du couvert végétal ;

ü Divagation d'un réseau fluviatile inondant la plaine alluviale ;

ü Succession de phases climatiques alternativement arides et plus humides,... (Fig. 28).

 

Fig. 28 : Un exemple de cyclothèmes des terrains carbonifères

 

 

 

CHAPITRE IV. ROCHES CALCAIRES

 

 

4.1. GENERALITES

 

Les roches sédimentaires sont composées de mélanges purs en proportions variables et peuvent être représentées par un diagramme triangulaire dont les pôles sont occupés par les trois éléments principaux constitutifs suivants (FOLK, 1961) :

 

a)    Eléments détritiques terrigènes : ils proviennent de l’érosion des roches préexistantes continentales (T) ;

b)    Eléments allochémiques (allochems) : ils sont formés à partir des processus chimiques allochtones (A) ;

c)    Eléments orthochémiques (orthochems) : sont ceux formés par précipitation chimique d’éléments dissous sur le lieu même de formation de la roche (O).

 

 

Fig. 29 : Classification générale des roches sédimentaires d’après Folk

3.2. ALLOCHEMS

 

D’origine biologie ou lithologique, ils comprennent les lithoclastes (limeclasts), les pellets ou granuls, les ooïds et les bioclastes (fossiles).

 

3.2.1. Lithoclastes

 

Ce sont des particules calcaires et comprennent les intraclasts et les extraclasts (Exoclasts).

 

3.2.1.1. Intraclasts

 

1° Définition

 

Ce sont des particules détritiques calcaires ou des fragments de roches carbonatées pénécontemporaines de la sédimentation et généralement peu consolidées au moment de leur dépôt. Ils proviendraient du bassin de sédimentation même par érosion sous-marine des roches carbonatées peu éloignées et essentiellement de même âge. Ils peuvent aussi provenir des phénomènes des fentes de dessiccation. Ils peuvent être déformées pendant leur dépôt et donner de « galets mous ». Ils peuvent provenir également d’une abrasion qui affecte quelques décimètres à quelques mètres de couches consolidées sous l’effet d’une faible activité tectonique sous-marine ou encore par l’action des vagues et des courants. Ils ont la taille de moins d’un millimètre et peuvent aller du sable fin un gros galet.

 

2° Forme

 

Ils sont bien arrondis, sphériques à discoïdes et rarement subanguleux. Dans certains cas ils sont très découpés et présentent de protubérances de forme compliquée. Wilson (1967) distingue différents types d’intraclastes et propose une terminologie basée sur l’apparence en lames minces.

 

a)  Intraclastes simples : leur taille est d’environ 0,25mm, la forme étant sphérique ou subsphérique. Ils sont constitués de carbonate de calcium et sans structure interne. Ils peuvent contenir un nucleus de quartz ou d’un fragment de tests.

 

Fig. 30. Intraclastes simples

 

b)  Les coquilles encroûtées aussi appelées « pseudostromata », ce sont des fragments de tests encroûtés d’auréoles de calcite cryptocristalline sombre, sans structure concentrique, la forme du nucleus étant conservée ;

c)  Les lumps sont des particules composées qui représentent un agrégat de un ou plusieurs types des grains de taille supérieure à 0,4mm.

 

3.2.1.2. Extraclastes

 

Ce sont des fragments des roches calcaires provenant d’une ancienne source située en dehors du bassin et sans relation avec leur dépôt. En d’autres termes, il s’agit de tout fragment de roches calcaires (carbonatées) provenant du remaniement et du transport d’un sédiment déjà compacté, d’origine plus lointaine ou antérieure.

 

3.2.2. Pelles ou granules (pelotes)

 

Ce sont des éléments arrondis, sphériques, elliptiques ou ovoïdes constitués par des agrégats de calcite (calcaire) microcristalline sans structure interne. Ils montrent une régularité de taille et de forme surprenante, leur taille étant comprise entre 0,03 et 0,15 mm. La taille moyenne est de 0,04 à 0,08mm. Selon KRMICKER et PURDY, ce mot des déjections fécales d’invertébrés sans structure radiaire ou concentrique. Elles peuvent également être une fine recristallisation en place d’une boue calcaire. Ils ont souvent interstratifiés avec des lits silteux ou gréseux et sédiments parfois en couches avec stratification entrecroisée traduisant ainsi une origine allochtone. Les particules qui ne correspondent pas à cette définition sont appelées pelletoïdes ou granules selon Wilson.

 

3.2.3. Ooïds

 

Les ooïds sont un terme qui couvre des oolithes, les pisolithes et les pseudolithes. Ce sont des particules caractérisées par une enveloppe (cortex) de carbonate de calcium (CaCO3) externe, stratifiée et concentrique qui entoure le nucléus de nature, de forme et de taille variables (Fig.31). Ce nucléus peut être un débris de fossile, un intra ou extraclaste, un pellet, …

 

Actuellement, le terme d’ « oolithe » désigne la roche, tandis que celui de « ooïds » désigne les particules. Les ooïds sont de grains carbonatés qui n’ont aucune structure organique et qui ne viennent au sein du bassin sédimentaire que par des processus mécanique, biochimique et physicochimique. Au point de vue de leur composition minéralogique, ils sont de deux types : calcitique et aragonitique. Au point de vue génétique, trois origines possibles sont indiquées : origine mécanique, biochimique et physicochimique.

 

Fig. 31 : Oolithe

 

  1. 1.   Origine mécanique : le cortex des ooïds proviendrait de l’agglomération des boues carbonatées. Ceci n’explique cependant pas l’orientation préférentielle des microcristaux observés au niveau du cortex des oolithes.
  2. 2.   Origine biochimique : les ooïds se formeraient par l’action bactérienne des microorganismes marins dans un milieu de sédimentation à pH supérieur à 10 (milieu ultrabasique).
  3. 3.   Origine physicochimique : elle est plus avancée et repose sur les observations classiques ; milieu à circulation et évaporation d’eau saturée en CaCO3.

 

3.2.4. Fossiles

 

On peut les rangs tous dans les allochèmes sauf les coraux et les algues qui se sont développés in situ et qui forment des masses relativement immobiles. Il est extrêmement difficile dans bien des cas de savoir si les fossiles se sont développées à l’endroit où ils vivaient et/ou s’ils étaient transportés.

 

3.2.5. Pseudoallochèmes

 

La classification de FOLK (1959) suppose que sont allochèmes tous les constituants calcaires remaniés à l’exception de certains fossiles sédentaires classés dans les orthochèmes. Cependant, il existe certains sédiments contenant des corps analogues à des intraclastes, à des oolithes ou à des granules mais formés en réalité sur place par le processus de recristallisation.

 

3.3. ORTHOCHEMES

 

Il est à noter qu’il y a roche consolidée si un ciment ou une matrice soude les sédiments. On appelle « ciment » tout ce qui précipite par processus chimique et qui consolide les sédiments. Une matrice est en revanche une phase granulométrique constituée d’éléments fins d’origine détritique remplissant les vides entre les particules. Les orthochèmes sont des précipités chimiques normaux formés dans la roche elle-même ou dans le bassin mais ne montrant pas de signes de transport ou très peu.

 

 

 

 

3.3.1. Micrite ou calcite cryptocristalline

 

La micrite est la calcite cryptocristalline que les anglo-saxons appellent « microcristalline calcite » (Folk, 1959), soit micrite en abrégé. Ces sont des grains de calcite très finement cristallisés de 1 à 4µm en moyenne, en général subtranslucide c’est-à-dire sombre au microscope et formant des grains de certaines roches calcaires (Ex. Les calcaires lithographiques). Ils sont opaques à l’œil nu, la teinte est grise, branche, brune parfois presque noire.

 

Cette calcite est considérée comme provenant d’une précipitation chimique ou biochimique rapide en milieu aquatique. Elle peut être ensuite remaniée par de faibles courants, les particules calcaires peuvent former aussi un sédiment. Il est aussi possible que les cristaux de calcite de 1 à 4 µm représentent une poussière produite par abrasion de coquilles et non une précipitation chimique. Et enfin, elle peut également provenir d’algue.

 

3.3.2. Calcite spathique ou sparite (sphary calcite)

 

C’est une calcite claire ou calcite spathique, sparite en abrégé, transparente et bien cristallisée. Elle se distingue de la micrite par sa clarté en lames minces et même à l’œil nu (précipitation lente entraînant une bonne cristallisation). Lorsqu’un cristal se casse, le plan de cassure suit celui de clivage, c’est ce qu’on appelle la « cassure spathique ». Cette calcite forme un simple ciment de remplissage des pores. Ainsi, la taille de ces cristaux dépend de celles des pores ainsi que de la vitesse de circulation. Elle est de 10 à 100 µm en moyenne.

 

3.4. CLASSIFICATION DES ROCHES CARBONATEES

 

Si l’on compare aux roches détritiques terrigènes, les calcaires peuvent être classés d’après la composition des éléments allochémiques, de la calcite cristalline (sparite) et de la calcite cryptocristalline (micrite). Les allochèmes sont des équivalents des grains détritiques et des galets dans les conglomérats. La calcite cryptocristalline est l’équivalent de la matrice argileuse dont la quantité est un indice de la violence des courants sur le lieu de dépôt. La calcite cristalline se développe dans l’espace poreux et joue là le même rôle que le ciment secondaire d’un grès consolidé. Si l’on rapporte les 3 groupes des constituants aux sommets d’un diagramme triangulaire, on obtient la répartition suivante : les calcaires de type 1, de type 2, de type 3 et de type 4 (Fig.32).

 

Fig. 32 : Digramme triangulaire de répartition des calcaires

 

Les calcaires de type I sont des roches allochémiques spathiques. Elles sont constituées d’éléments allochémiques cimentés par la calcite cristalline. Ces roches montent une stratification entrecroisée et sont l’équivalent d’un grès bien classé. Il doit y avoir une quantité minimale d’allochèmes pour permettre la précipitation de la calcite cristalline qui ne croît que dans les espaces poreux et ne forme pas de roches en elle-même.

 

Les calcaires de type II sont des roches allochémiques cryptocristallines. Elles contiennent aussi une proportion importante d’allochèmes mais dans ce cas, le courant n’est pas encore fort pour laisser la fraction de sparite de former un ciment. La calcite spathique est rare ou absente quand il n’y a pas d’espace disponible pour elle. Les proportions d’allochèmes dans ce groupe varient entre 0 et 80% car elles peuvent former une roche à eux seuls.

 

Les calcaires de type III sont des roches cryptocristallines pures où la calcite spathique et les allochèmes sont absents. Ce sont par exemple les calcaires lithographiques. Ces roches cristallines sont des dismicrites (une micrite à plage recristallisées sparitiques).

 

Les calcaires de type IV sont des biohermes ou des calcaires récifaux. Ce sont des roches formées par les accumulations des restes d’organismes in situ. Ce terme désigne des roches à organismes naissant, croissant et mourant sur place (le lieu de dépôt). On distingue : les biolithes à algues, les biolithes à coraux, les biolithes à rudistes. Il existe des subdivisions à l’intérieur de chaque famille en tenant compte de la matrice et du pourcentage d’allochèmes. Une place importante relative et décroissante est attribuée respectivement aux intraclastes, aux oolithes et au groupe des fossiles (pellets).

 

Le nom de la roche est fourni par la juxtaposition d’un préfixe en rapport avec la composition des allochèmes et d’un suffixe en relation avec la phase liante soit sparitique, soit micritique. Exemple Intra (intrasparite, intramicrite), Oo (oosparite, oomicrite), Bio (biosparite, biomicrite), Pel (pelsparite, pelmicrite).

 

N.B. :

ü Pour les calcaires de type III, c’est le terme micrite qui est le seul utilisé. Si une certaine quantité d’allochèmes est observée de manière significative, elle peut être spécifiée : Ex. oosparite fossilifère.

ü Lorsque la taille moyenne des allochèmes est supérieure à 2mm, le terme de rudite peut être ajouté : Ex. Intrasparudite ou oosparudite. Cette nomenclature s’applique aux calcaires et si la roche comprend plus de 10% de dolomie de substitution le terme « dolomitisé » s’ajoute au nom principal : Ex. Oosparite dolomitisé.

ü Lorsque l’origine de la dolomite est incertaine, c’est le terme « dolomitique » qui est employé mais la dolomite peut être aussi primaire, déposée sous forme de boue. C’est le terme « dolomicrite » qui est utilisé. Si la roche est entièrement dolomitisée, elle entre dans une classe distincte qui constitueraient alors le type V avec comme exemple la dolomie de remplacement des fantômes d’allochèmes pouvant ou non être visibles.

ü La présence de 10 à 50% de matériel terrigène est assez importante pour être signalée. On parlera par exemple : d’intrasparite sableuse dolomitisée ou de la biopelmicrite argileuse.

CHAPITRE V. ROCHES DOLOMITIQUES

 

 

5.1. GENERALITES

 

Le terme dolomie signifie roche tandis que celui de la dolomite correspond au minéral (carbonate double de calcium et magnésium). Les Anglo-saxons utilisent le terme dolomite aussi bien pour la roche que pour le minéral. En 1948, le géologue Schrok proposa le nom de dolostrone pour la roche et celui de limestone pour le minéral. Sur le terrain, il y a difficulté de différencier les dolomies des calcaires. Toutefois, les caractéristiques suivantes peuvent aider à identifier les dolomies :

 

a)   Cassure granuleuse, esquilleuse, saccharoïde,

b)   Odeur caractéristique des œufs pourris (H2S),

c)   Pas d’effervescence avec l’acide chlorhydrique dilué à 10%, cependant cet acide réagit à chaud,

d)   Les lignes en creux semblables aux rides d’une peau d’éléphants,

e)   Pulvérisée, la dolomie peut dégager quelques bulles de gaz sous l’effet de l’acide HCl,

f)    Mise en évidence par la coloration sélective avec le produit dit lizarine.

 

5.2. ETAT CRISTALLOGRAPHIQUE ET MINERALOGIQUE DU MINERAL DOLOMITE

 

5.2.1. Généralités

 

Le carbone double de Ca et Mg donne du point de vue pondéral 30,4% de CaO, 21,9% de MgO et 47,7% de CO2. Ceci correspond à des concentrations moléculaires égales de CaO dont la masse moléculaire est 56 et de MgO de masse moléculaire de plus ou moins 40. Cette proportion équimoléculaire de chaux et de magnésite montre que la dolomite n’est pas un cristal mixte ou une solution solide. Ceci se traduit, du point de vue cristallochimique par des alternances des ions Ca++ et Mg++ dans la maille rhomboédrique. La dimension de la maille de la dolomite est légèrement inférieure à celle de la calcite car le rayon ionique du Mg est plus petit que celui du Ca. Ces propriétés sont responsables des raies particulières dans les spectres de la diffraction des rayons X (DRX) de la dolomie.

 

5.2.2. Divers types de carbonates magnésiens

 

On distingue 4 types de carbonates magnésiens :

 

a)   La calcite magnésienne : elle contient jusqu’à 25% de moles de carbonate de magnésium (MgCO3). Mais le Mg n’est pas régulièrement distribué dans le réseau cristallin. La maille est rétrécie par la substitution d’ions Mg2+ et Ca2+, ce qui provoque un décalage des raies de calcite sans apparition caractéristique des raies de Mg.

b)   L’aragonite magnésienne : elle est constituée suivant le même principe mais dans le système orthorhombique.

c)   La dolomie calcifère : un excès d’ions calcium provoque un découpage en cristallites d’environs 100A° de diamètre. En général, l’introduction du Ca en excès détermine un abaissement du degré d’ordre de la dolomite mesuré par le rapport des intensités de certaines raies de diffraction X.

d)   La protodolomite : mise en évidence par GRAFT et GOLDSCHMIDT (1965), elle a été obtenue dans certaines expériences de synthèse avant l’apparition de la dolomite. Chimiquement et structuralement, elle est très proche de la dolomite mains moins ordonnée que cette dernière.

 

5.2.3. Stabilité du carbonate calco-magnésien

 

La dolomite est la seule forme stable du carbonate calco-magnésien. Les dolomies calcifères tendent à se dédolomitiser c’est-à-dire qu’il se forme une exsolution de calcite. Cette transformation peut être lente : KUBLER (1958) a signalé un carbonate contenant 50% de MgCO3 dans la région de Neuchâtel et qui serait peut-être une protodolomite. Celle-ci s’observe surtout dans les sédiments récents dans le lac du sud-est australien et dans les croûtes supratidales de bahamas.

 

L’aragonite magnésienne de certaines coquilles perd rapidement son Mg après la mort au profit de la calcite. Certains métaux accompagnent parfois le Mg et le Ca dans la maille carbonatée de dolomite. Le fer est le plus fréquent et donne les dolomites ferrifères qui passent à l’ankérite [MgFe (CO3)2] notamment dans les dolomies hydrothermales. Les cristaux de dolomite contiennent en général des inclusions à l’état de trace (Mn, Pb, Zn, …) dont l’étude peut renseigner sur leur genèse. Les calcites magnésiennes tendent avec le temps et suivant le milieu favorisé par l’augmentation de la température et la présence du CO2 à exsuder leur Mg sous forme de protodolomite qui est la seule forme stable avec la calcite.

 

5.3. CLASSIFICATION DES DOLOMIES

 

5.3.1. Série allant des calcaires aux dolomies

 

On distingue :

 

ü Les calcaires : moins de 5% de dolomite,

ü Les calcaires magnésiens : renferment 10 à 50% de dolomite,

ü Les calcaires dolomitiques : entre 50 à 90% de dolomite,

ü Les dolomies : 90 à 100% de dolomite.

 

Dans les roches carbonatées récentes la dolomite n’apparait que pour des pourcentages en carbonate de Mg (MgCO3) d’environ 15%. Tandis que dans les roches anciennes la dolomite n’apparaît que pour 2 à 3%.

 

On distingue trois groupes de base en fonction du pourcentage de minéral dolomite (Tableau 2).

Groupe au sens

large

%

dolomite

subdivisions

Calcaires

0 – 5

ü Calcaires typiques CO3Mg˂3%

ü Calcaires magnésiens CO3Mg˃3%

Calc. dolomitiques

5 – 75

ü Calc. légèrement dolomitiques 5-25% dolomite,

ü Calc. Dolomitiques s.s. 25-50% dolomite,

ü Calc. très dolomitique 50-75% dolomite.

Dolomies

75 – 100

ü Dolomies calcifères 75-95% dolomite,

ü Dolomies typiques 95-100% dolomite,

ü Dolomies magnésiennes MgCO3˃45,7%.

5.3.2. Classification basée sur la teneur en Ca et Mg

 

On distingue 5 groupes :

 

ü Les calcaires : la teneur en MgCO3 est de 5%,

ü Les calcaires magnésiens : de 5 à 10% de MgCO3,

ü Les calcaires dolomitiques : 10 – 50% de MgCO3,

ü Les dolomies calcifères : 50 – 90% de MgCO3,

ü Les dolomies : les teneurs en MgCO3 passent de 90 à 100% de dolomite.

 

5.3.3. Classification basée sur la texture (et structure)

 

On aura :

 

ü Les dolomies grenues,

ü Les dolomies microgrenues,

ü Les dolomies cryptoformes,

ü Les dolomies polymorphes.

 

5.3.4. Classification en fonction du mode de gisement, du faciès pétrographique et des particularités physicochimiques

 

Les dolomies au sens large et les calcaires magnésiens peuvent se rencontrer dans la nature sous divers gisement. Cela a conduit les auteurs à proposer diverses classifications. On parlera ainsi de gisement d’extension locale ou régionale, de dolomies secondaires ou chimiques, métasomatiques, diagénétiques ou épigénétiques. On ne connaît pas les processus génétiques en détail et la notion de primaire appliquée à certaines dolomies n’est pas claire.

 

Actuellement, on admet de manière assez générale que toutes les dolomies se forment par remplacement de calcite, d’aragonite, ou de protodolomite dans l’évolution des vases ou des débris carbonatés plus ou moins magnésiens. Cette évolution est plus ou moins précoce et on peut définir d’une part des dolomies résédimentées et des dolomies syngénétiques, puis diagénétiques et enfin, épigénétiques. C’est la classification de FRIEDMAN et SANDERS (1967). Il existe tous les intermédiaires entre ces 4 ensembles. On peut également classer les dolomies suivant les caractères pétrographiques et la texture ou la structure de l’échantillon où l’on distingue des types microgrenus, cryptogrenus, pélitomorphes et biomorphes. C’est la classification de TEODOROVICH (1958). SCHMIDT (1965) propose la classification suivante :

 

Tableau 3. Classification de SCHMIDT

 

Calcite ˃ dolomite

Dolomite ˃ calcite

Micrite ˃ corps figuré

(allochèmes)

Calcimicrite

Dolomicrite

Micrite ˂ corps figurés ˂ 2mm

Calcarénite

Dolarénite

Micrite ˂ corps figurés ˃ 2mm

Calcirudite

Dolorudite

Carbonates (en cristaux ˃ 20µm)

Calcaire cristallin

(sparite)

Dolomie cristalline

saccharoïde

 

On peut également proposer une classification suivant le milieu de genèse. On parlera de milieu marin, milieu lacustre et milieu continental, etc.

 

5.4. DONNEES PHYSICO-CHIMIQUES COMPLEMENTAIRES

 

5.4.1. Densité, porosité, perméabilité et rigidité

 

Ces notions intéressent les géologues du pétrole. On doit noter que la dolomite est plus dense que la calcite (dolomite a comme densité 2,866 et calcite 2,716). Ceci est lié à la compaction du réseau cristallin. Il est impossible de mesurer globalement le pourcentage de dolomie en raison de la présence des vacuoles et impuretés (inclusions) diverses. Cette mesure n’est possible qu’après broyage de l’échantillon. On attribue les notions de porosité et de perméabilité à une augmentation de la densité.

 

La porosité, dans certains cas, atteint la valeur de 12% de la compaction volumétrique calculée pour la transformation calcite – dolomite. En réalité, la dolomitisation se déroule en système ouvert exposé à une perforation continue et sous pression isostatique notable. La porosité de la dolomite peut avoir une autre origine par exemple, la persistance de vacuoles originelles notamment dans le cas de dolomie bioclastiques récifales ou apparition des vacuoles dans le cas de dédolomitisation ou décalcification partielle.

5.4.2. Thermoluminescence

 

Les études récemment entreprises cherchent à connaître le rapport qui existe entre la variation de la thermoluminescence et l’âge de la roche. Les études actuelles sur la thermoluminescence artificielle permettent de donner deux courbes d’émissions ayant deux pics l’un à 115°C et l’autre à 235°C. La hauteur de ces pics et le rapport des hauteurs caractérisent trois groupes de dolomies qui correspondent essentiellement aux groupes génétiques naturels :

 

ü Dolomies syngénétiques : dites primaires,

ü Dolomies diagénétiques : secondaires,

ü Dolomies épigénétiques : hydrothermales.

 

5.4.3. Propriétés isotopiques

 

Les dolomies métasomatiques semblent avoir une proportion des isotopes stables lourds comme dans le carbone, systématiquement plus forte que les calcaires marins ordinaires qui eux-mêmes sont plus riches en 13C. Ceci  serait lié à un lessivage du 12C par les fluides dolomitisants plus aisément que le 13C. En étudiant les isotopes 12C et 13C et ceux de l’oxygène, on constate que rien ne distingue clairement les dolomies primaires non évaporitiques de dolomies secondaires. Les dolomies marines sont plus ou moins précocement en équilibre isotopique avec la mer. En ce qui concerne les isotopes d’oxygène, rien de distingue de manière significative les dolomies d’eau de mer dans les assemblages calcite-dolomite naturelle et artificielle. On observe toutefois dans les assemblages de synthèse par précipitation à haute température un fractionnement des isotopes d’oxygène avec enrichissement de la dolomite en isotopes lourds.

 

Pour d’autres auteurs, il n’y a pas de fractionnement isotopique et la dolomite se formerait non pas par précipitation directe, mais par métasomatose magnésienne d’une calcite préexistantes sans intervention du carbone ni de l’oxygène.

 

 

En conclusion, les études isotopes ne permettent pas de décider de l’origine primaire des dolomies, mais par contre les études des isotopes d’oxygène renseignent sur les températures atteintes par les eaux syn et diagénétiques.

 

5.4.4. Inclusions fluides

 

Principe : On précise la nature primaire ou secondaire des inclusions d’abord, ensuite voir si leur répartition est homogène ou au contraire contrôlée par les cassures. On sélectionne les cristaux à inclusions primaires. On détermine la température de fonction de ces inclusions, donc la formation des cristaux et enfin la composition chimique.

 

5.4.5. Eléments en trace et fractions insolubles

 

On étude les éléments contenus dans les dolomies primaires, syn et diagénétiques et même épigénétiques en vue de mettre en évidence la différence entre ces différentes dolomies.

 

5.5. PARAGENESES COMPLEXES, DIAGENESES POLYPHASEES ET METAMORPHISME

 

Dans beaucoup de dolomies en plus de l’ion carbone on trouve des minéraux divers. Leur étude permet de préciser les conditions physico-chimiques de la dolomitisation ainsi que le moment précis où ce phénomène a pris place. Les études récentes montrent que la dolomitisation est un moment simple de l’histoire diagénétique faite d’une suite de paragenèse ayant été détruites par les phénomènes de dissolution ou de remplacement. Certaines cristallisations sont fréquentes en rapport avec la dolomitisation : exemple les ions (SO4)2- et les argiles magnésiens. D’autres n’ont pas de rapport évident par exemple FeSiO4 (Fayalite) et la silice.

 

5.5.1. Gypse et anhydrite

 

Les dolomies sont fréquemment associées à ces minéraux. Ce qui montre que ces roches sont de faciès à tendance évaporitique sans être des évaporites au sens strict.

5.5.2. Argiles magnésiennes

 

C’est une paragenèse essentiellement magnésienne avec comme exemples l’association de dolomie, chlorite et illite. On peut également avoir le talc associé à des calcaires dolomitiques. Ce talc serait diagénétique mais antérieur à la dolomitisation. On signale également l’abondance de la montmorillonite, tout comme la présence de l’illite et un faible pourcentage de kaolinite.

 

Quelles soient héritées ou pas, les argiles apparaissent légèrement avant la dolomite. Les argiles et la dolomite peuvent servir à préciser le milieu de dépôt. Toutefois les argiles ont un rôle essentiel dans la dolomitisation sur place, d’abord comme catalyseur ou genre de cristallisation, à distance comme magasin à magnésium susceptible de le céder à des eaux migratrices à partir d’une certaine profondeur en échange de K.

 

5.5.3. Phyllosilicates ferreux

 

Ils semblent en général antérieurs à la dolomitisation et attestent ainsi des phases syngénétiques liées à des conditions de faible profondeur marine (Ex. Chlorite). On connait des dolomies glauconieuses à grains saccaroïdes résultant d’une dolomitisation des calcaires glauconieux.

 

5.5.4. Silice

 

Les rapports entre la silicification et la dolomitisation sont variables. Les accidents siliceux sont plus rares dans les dolomies que dans les calcaires. Cela est dû à une origine néritique des dolomies par opposition aux cherts dans les calcaires des zones plus profondes. Il y a des exceptions où on trouve des cherts dans les dolomies. Dans certains cas, la silicification peut être postérieure à la dolomitisation.

 

5.5.5. Minéralisation associées aux dolomies

 

Il y a lieu de distinguer des dolomies primaires, syn et/ou épigénétiques de dolomies saccharoïdes qui sont-elles, épigénétiques. Les dolomies primaires peuvent être associées aux minéralisations de type syngénétiques (Ex. les dolomies à Pb-Zn de la Namibie où les ions Pb2+ et Zn2+ auront été assemblés en même temps que le Mg par la vase carbonatée à la faveur d’une sédimentation ralentie).

 

Quant aux dolomies épigénétiques (hydrothermales) et structurales souvent ankéritique, on peut les trouver dans les gangues de diverses minéralisations. Les plus intéressantes sont celles des gisements de Pb et Zn. En ce qui concerne les dolomies structurales épigénétiques dont le développement est contrôlé par les failles, les minéralisations cuprifères sont localisées dans ces dolomies. La relation avec le magma basique n’est pas à exclure (Ex. Kipushi, RDC).

 

5.5.6. Métamorphisme

 

La dolomie pure est extrêmement stable. Elle commence à cristalliser avec libération de CO2 et de Mg. Raison pour laquelle dans la nature on trouve des bancs dolomitiques bien conservés au milieu des domaines métamorphisés. Elles restent tectoniquement compétentes et offrent un abri à leurs éventuels fossiles contre la recristallisation et l’écrasement. Les dolomies impures tendent à se décomposer par silicatation en talc, en serpentine (Mg6[Si4O10(OH)2](OH)6), si le milieu est riche en eau, ou en trémolite en milieu anhydre avec formation de calcite et CO2.

 

5.6. PROBLEME DE LA DIAGENESE DES CARBONATES ET DE LA FIXATION BIOLOGIQUE DE MAGNESIUM DANS LES TESTS

 

Les squelettes des vertébrés renferment souvent une forte proportion de carbonate de Mg (MgCO3), laquelle dépend du type biologique et de la température des eaux où les organismes vivent. Cette dépendance vis-à-vis de la température est maximale pour des organismes les moins évolués : exemple les protozoaires. Les tests calcitiques contiennent plus de MgCO3 que les tests aragonitiques et la quantité de Mg de la partie récente du test dépend de la température moyenne des eaux. Durant la période correspondante qui est de 15 jours, cette fixation biologique de Mg est relativement faible environ (25 à 30% de Mg). Plusieurs processus conduisent des phases instables (aragonite et calcite magnésienne) aux phases stables (calcite et dolomite). Ces processus sont :

a)  A l’état solide : l’inversion de l’aragonite en calcite. C’est un processus rapide in vitro mais beaucoup plus lent dans la nature où l’augmentation du pH et la présence d’ions de Mg ralentissent le processus. On peut avoir ici une exsolution de la protodolomite à partir de la calcite magnésienne initiale.

b)  Par dissolution : on peut avoir une dissolution totale congruente de l’aragonite ou de la calcite magnésienne. Il peut y avoir une dissolution incongruente de la calcite magnésienne avec départ des ions Mg2+ et une calcite non magnésienne remplaçant directement la calcite magnésienne initiale.

c)  Par remplacement : c’est une épigénie quelconque ou simple dolomitisation. La dolomitisation est favorisée par la plus grande instabilité de matériel et la concentration plus forte des solutions dolomitisantes. Le rapport Mg/Ca plus élevé dans ces solutions, l’abondance de ces solutions, la température élevée et la susceptibilité du matériel seront déterminant dans ce processus. En ce qui concerne ce dernier point, on peut noter la succession suivante, partant du plus dolomitique au moins dolomitique : Coraux → halimeda → algues vertes → mollusques → faunes pélagiques → faunes benthiques →   échinodermes → algues rouge.

 

En conclusion, la fixation biologique du Mg peut permettre l’élévation ultérieure de la concentration magnésienne des eaux profondes et favoriser ainsi la diagenène dolomitique.

 

5.7. ENRICHISSEMENT MAGNESIEN DIRECT PAR L’EAU DE MER ET FORMATIONS DOLOMITIQUES AUTHIGENES ET DOLOMITIQUES RESEDIMENTEES

 

a)  Sur les rivages : on signale un enrichissement intercotidal (Estran) en MgCO3 dans les mers chaudes sur les platiers (Hauts fonds sous-marins à surface plane) par les vagues.

b)  Sur les fonds néritiques ou vaseux : il y a un enrichissement en Mg qui intervient en eau peu profonde en particulier sur les calcaires organogènes et magnésiennes.

c)  Les rhomboèdres dolomitiques des vases sous-marines : on en trouve fréquemment dans les mers chaudes. Il s’agirait des prismes authigènes dérivant de fractions squelettiques magnésiennes. Dans de nombreux cas, on a pu montrer aussi qu’il existait des rhomboèdres résédimentés.

 

5.8. FACTEURS IMPORTANTS DE LA DOLOMITISATION

 

  1. 1.   Les températures relativement élevées (35 à 55°C) : elles sont favorables pour les dolomies syngénétiques. Les températures situées entre 150 à 200°C correspondent aux températures favorables pour les dolomitisations épigénétiques. Dans les mers chaudes la solubilité du CO2 diminue, l’aragonite précitée et les squelettes intensifient la fixation du Mg.
  2. 2.   La salinité élevée mais non excessive : elle est favorable à la dolomitisation. Les dolomies lithoïdes primaires sont plus fréquentes dans les environnements à tendance évaporitique plus ou moins accentuée par suite des phénomènes biologiques. Pour les dolomies diagénétiques et épigénétique, le milieu initial de sédimentation peut être quelconque vis-à-vis de la salinité.
  3. 3.   Le rôle de CO2 : le CO2 doit être disponible mais à des concentrations modérées. On a tendance ici à surestimer le rôle du facteur pression du CO2. Ce rôle est important suivant que sa concentration est stabilisatrice ou solubilisatrice des ions CO32- et transporteuse des bicarbonates. On connait des dolomies formées dans des domaines où la pression du CO2 est diminuée par la chaleur ou par la photosynthèse. Le CO2 doit être présent mais plutôt à des faibles teneurs.
  4. 4.   Le rapport Mg/Ca : si ce rapport est élevé, il y a formation de la dolomite. c'est la précipitation d’aragonite ou de gypse qui détermine généralement l’apparition des saumures enrichies en Mg.
  5. 5.   Le rôle des ions SO42- : il intervient faiblement dans la salinité totale en fixant une partie de Ca sous forme de gypse. Il permet l’apparition de saumures magnésiennes attaquées par les bactéries sulforéductrices. Les ions SO42- permettent la carbonatation éventuellement dolomitique des boues euxiniques (organiques).
  6. 6.   Le pH optimal : celui des solutions dolomitisantes est mal défini. Il est ˂7 dans les sebkhas persiques, approximativement de 9 dans les vases à fermentations anaérobiques ou dans les milieux chauds à photosynthèse active. Un pH moyen de 8 (celui de l’eau de mer) est favorable à la précipitation de la dolomite. Une augmentation de pH accroît la sursaturation de l’eau de mer vis-à-vis de la calcite surtout et aussi de la dolomite.
  7. 7.   La pression hydrostatique : la dolomite étant plus dense que la calcite, sa formation est favorisée par un accroissement de pression. La diagenèse dolomitique se produits de préférence sous certaines charges d’eau et des sédiments entre 0 et 150m, parfois même 300m.
  8. 8.   La nature de sédiments originels : tous les sédiments carbonatés peuvent être dolomitisés mais les vases aragonitiques sont les plus favorables. Par exemple, les roches contenant à l’origine une certaine proportion de boues calcaires microcristallines sont sélectivement dolomitisées par rapport à des roches bioclastiques lessivées. Les vases euxiniques constituent un milieu généralement favorable à cause des phénomènes de fermentation responsables de l’odeur fréquemment fétides des dolomies.
  9. 9.   Le facteur temps : il est essentiel pour la formation des dolomies. Les dolomies hydrothermales et épigénétique se forment après des millions d’années. Les dolomies diagénétiques et pénécontemporaines évoluent sur des dizaines à des centaines des milliers d’années à partir de dépôts des sédiments calcaires originels. Seules les catégories des dolomies primaires échapperaient à cette genèse différée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CHAPITRE VI. ROCHES DETRITIQUES TERRIGENES (RDT)

 

 

6.1. CLASSIFICATION ET PRINCIPES GENERAUX

 

6.1.1. Facteurs de la composition

 

Les roches détritiques terrigènes (RDT) sont des roches sédimentaires dont la phase principale dérive d’une érosion mécanique sur le continent ou aire d’alimentation. La nature de ces roches dépend d’un certain nombre de facteurs étroitement imbriqués.

 

a)  L’aire d’alimentation : elle conditionne en priorité la composition pétrographique des détritiques et en partie la granulométrie. Elle peut être homogène ou hétérogène. En effet les produits de plusieurs aires d’alimentation peuvent aussi se mélanger durant le transport de matériaux ou dans le bassin de sédimentation. Les aires d’alimentation pétrographiquement proches mais soumises à des régimes tectoniques et climatiques différents élaborent des cortèges détritiques différents.

 

b)  Le régime tectonique : suivant qu’il sera plus ou moins jeune (donc actif), il permettra le départ d’une quantité plus ou moins grande d’éléments peu dissociés.

 

c)  Le régime climatique : commande l’importance de l’agressivité chimique et donc la plus grande abondance des spectres d’émissions des minéraux très instables et des minéraux stables comme le quartz. A cette catégorie de facteur est liée la vitesse de sédimentation qui influe directement sur le volume interstitiel laissé disponible pour un ciment éventuel et sur la nature de ce dernier, laquelle est liée aussi au chimisme du bassin de sédimentation et à l’activité biologique.

 

d)  Les actions post – sédimentaires dite diagénétiques ou épigénétiques impriment au cortège pétrographique une empreinte plus ou moins visible et non négligeable.

 

6.1.2. Critères de classification des roches détritiques

 

Une roche détritique terrigène doit être caractérisée par :

 

a)   Sa granulométrie et son classement,

b)   La nature pétrographique des éléments qui la composent,

c)   La nature et l’importance du ciment (matrice),

d)   La nature et l’importance des transformations dia et épigénétiques.

 

Les indications complémentaires peuvent être fournie par :

 

ü La couleur de la roche,

ü La structure de la roche,

ü Les éléments accessoires.

 

6.1.3. Classification granulométrique

 

Principe : Etablir des coupures régulières en fonction de la taille à l’échelle logarithmique, en d’autres termes établir des classes en choisissant une gamme de tamis en progression géométrique.

 

On distingue trois classes granulométriques principales (Tableau 3) :

 

ü Les rudites : les éléments ont à majorité un diamètre ˃ 2mm,

ü Les arénites : taille des éléments comprise entre 0,063mm et 2mm,

ü Les lutites (silts) : taille des éléments ˂ 0,063mm.

 

N.B. : Il faut retenir l’importance distinction entre les silts et les argiles au point de vue granulométrique. Le terme limon désigne une classe de roches non consolidées dont la taille des grains se situe entre 2 et 50µm. C’est aussi un terme pédologique.

Les roches consolidées : le terme grès au sens large, désigne une roche constituée de particules de 0,063 à 2mm de diamètre mais l’usage au sens strict est réservé au grès formé au moins de 50% de quartz.

Les lutites : une limite doit être faite entre les silts et les argiles. On peut parler de siltite et de pélite pour les lutites consolidées de taille ˃ 2 µm.

Les argiles : on parlera des argilites pour des roches consolidées. Les shales sont des argilites feuilletées dont la dimension des particules est inférieure à 25 µm. et qui peuvent être à cheval entre les argilites et les siltites feuilletées.

 

Tableau 4 : Classification granulométrique des roches détritiques terrigènes

 

6.1.4. Classification pétrographique

 

  1. Rudites : ce groupe est représenté par les conglomérats pouvant être des poudingues (éléments arrondis) ou des brèches (éléments anguleux). Ils peuvent être monogéniques ou polygéniques.
  2. Arénites : roches dont les fragments sont les quartz, les feldspath et les débris lithiques. Ces constituants sont liés par un ciment ou une matrice. Ainsi, pour le nommer on utilise un diagramme triangulaire aux sommets occupés par quartz (Qz), feldspath (F) et éléments lithiques (L).

 

Fig. 33 : Diagramme ternaire de la classification pétrographique des arénites consolidé

 

  1. Lutites : ce sont des roches détritiques terrigènes dont les dimensions des grains sont inférieures à 63 µm.

 

Problème des argiles : on utilisera dans l’industrie les argiles R caractérisées par un comportement bon à la cuisson, une propriété de plasticité, des propriétés absorbantes vis-à-vis des liquides, des cations et des anions.

 

L’expérience a provoqué que ce comportement des argiles était due à leur granulométrie très fine. Ainsi est apparue la notion de l’argile granulométrie désignée argile G dont la phase principale est inférieure à 2 µm. Plus récemment, on a cherché les éléments responsables de ce comportement argileux. On a montré que ce comportement argileux est dû à l’abondance dans la phase fine des phyllosillicates finement divisés de taille généralement égale ou inférieure à 2 µm appelés argile minéralogie où argile M. Le comportement argileux est dû à un état de finesse très poussé qui s’ajoute aux caractères phylliteux de petites particules. Ces argileux ont aussi la faculté de dispersion des particules dans l’eau leurs permettant de former des suspensions colloïdes et de mettre en œuvre leurs propriétés absorbants. On arrive ainsi à la notion de faciès argileux que peuvent prendre des phyllosilicates à l’état finement divisé.

 

Avec cette ultra division s’introduit très souvent un certain degré de désordre dans les structures cristallographiques et les compositions chimiques. Une partie des argiles M dite microphyllites a des équivalents de taille supérieure à 2 µm. qu’on appelle de macrophyllites (Ex. Micas), lesquels n’ont pas le comportement argileux.

 

En résumé, le terme argile M désigne uniquement une roche meuble à  comportement argileux. Celui d’argile G désigne une phase inférieure à 2 µm. Dans les roches, cette phase est généralement constituée à majeur partie par des microphyllites (inférieur à 2 µm) qu’on appelle des argiles M.

 

Enfin, une partie de ces argiles M constitue le facies argileux d’espèce appartenant également à l’état macrophyllite. Ce sont des phyllosicates dont la taille est supérieure à 2 µm.

 

6.1.5. Classement et notion de degré d’évolution

 

On peut exprimer la granulométrie d’un sédiment détritique par un certain nombre des paramètres notamment la médiane et le mode. La médiane est la classe moyenne dans laquelle l’échantillon est bien représenté. Le mode d’un sédiment est facilement mesurable mais seulement si le classement est bon. Dans certains cas, il peut exister un passage continu de sédiments, de grossiers à la fraction fine, c’est-à-dire de détritiques à la matrice. Il sied de signaler que la distinction du point de vue génétique est très importante suivant que le ciment est primaire ou secondaire.

 

 

 

De nombreux auteurs américains accordent une importance à ce que l’on appelle « maturity » que l’on peut traduire par degré d’évolution. Il s’exprime suivant les auteurs par divers critères qualitatifs tels que :

 

ü Le classement ou indice de classement,

ü L’arrondi des grains,

ü Le pourcentage de la matrice.

 

Il semble que le classement et le pourcentage de la matrice évoluent de façon inversement proportionnelle. L’analyse génétique de nombreux cas conduit à trouver la forme empirique fondamentale suivante, impliquant ensemble ces diverses valeurs.

 

He = (Q3 – Q1)/2

 

Avec : Q3 = taille de la plus grande, Q1 = taille la plus petite et He = Indice d’hétérométrie.

 

Il faut noter l’indice d’hétérométrie (He) tend vers 0 lorsque le classement est bon.

 

Il convient de rassembler les éléments nécessaires pour l’analyse génétique de la roche et indique obligatoirement le pourcentage de l’élément détritique par rapport au ciment (matrice) et évaluer le degré de classement. Une matrice est composée d’élément allochémiques, par exemple, d’origine chimique ou détritique. Le ciment est d’origine chimique, peut être primaire ou secondaire, dans ce dernier cas, il résulte du remplacement du ciment primaire.

 

Dans la nature toutes les formations ne sont pas équilibrées et souvent on se trouve en présence d’une roche dont les constituants sont des dimensions variables. C’est l’étude de ces différentes dimensions qu’on appelle granulométrie. On peut représenter la composition granulométrique d’une formation par un graphique : en abscisse, on porte la taille des grains et en ordonnée on reporte le pourcentage (%) cumulé de chaque taille suivant une échelle arithmétique. On obtient des courbes suivantes :

 

 

Fig. 34 : Courbe cumulative des formations homométriques (a) et hétérométriques (b).

 

La figure (a) présente une formation hométrique bien classée car, il existe très peu de grains de taille ˂ 1mm et très peu de grains de taille ˃ 1,5mm. C’est – à – dire que toute la formation est constitué d’éléments de taille comprise entre ces deux valeurs.

 

La figure (b) présente à son tour une formation constituée de grains de tailles différentes, c’est - à - dire qu’on peut donc avoir affaire à une formation de cailloux emballés dans des limons ou à une formation mélangeant les sables et les argiles. Mais en plus de la nature pétrographique et de la taille des éléments on s’intéresse aussi, pour étudier l’évolution des sédiments, à la forme et à l’aspect de grain. Cette étude s’appelle la morphoscopie.

 

Il convient, lorsqu’il s’agit de sable de quartz, de distinguer :

 

ü Des grains non usés, c’est-à-dire ceux qui n’ont subi un transport dans l’eau fluviale ou marine ;

ü Des grains émoussés, c’est-à-dire ceux qui ont subi un transport dans l’eau fluvial ou marine ;

ü Des grains rond-mats, ceux qui ont subi un transport éolien et les chocs à sec pendant ce transport. Ces derniers ayant occasionné de multiples cassures microscopiques de telle sorte que les grains ne se brisent pas. Lorsqu’il s’agit de galets ou de cailloux on étudie le degré d’émoussé.

 

Si l’émoussé est nul, on parle de cailloux, s’il est sensible on parle de galet. Le degré d’émousse de galets se mesure en posant le galet à plat. On l’exprime par un indice appelé indice d’émoussé qui est le rapport entre le diamètre du cercle de la petite courbure du galet et le grand axe de ce galet. Ce qui revient à dire entre 2 fois le rayon de la plus petite courbure et le grand axe en question.

 

E = 2r/L

 

D’où L : longueur ; : largeur ; r : petit rayon de courbure et e : épaisseur.

 

 

Fig. 35 : Mesure de l’indice d’émousse d’un galet

 

6.1.6. Ciment et matrice

 

Le ciment est la phase subornée qui lie entre eux les éléments de la phase détritique principe. Mais cette notion est relative au point de vu génétique. La différence entre ciment et matrice est que matrice est la phase subordonnée intergranulaire d’origine détritique terrigène. Le ciment primaire, par contre, est la phase subordonnée d’origine chimique ou biochimique occupant les espaces intergranulaires de la phase détritique terrigène principale et déposé pratiquement en même temps que la que cette dernière. Le ciment secondaire est la phase subordonnée d’origine chimique ou biochimique occupant les espaces intergranulaires de la phase détritique terrigène principale et résultant d’une transformation ou d’un remplacement du ciment primaire ou de la matrice. Les facteurs dia et épigénétiques apparaissent alors. La distinction entre ces deux ciments est parfois difficile. Mais au point de vue génétique a distinction entre matrice et ciment est importante.

 

6.2. NOMENCLATURE DES RUDITES

 

6.2.1. Rudites consolidées

 

  1. a.   Généralités

 

Ce groupe est présenté par les conglomérats (appelés aussi poudingues). Ce sont des roches cohérentes constituées de galets arrondis à subanguleux d'un diamètre supérieur à 2 mm et d'un liant.

 

Le terme brèche s'applique non seulement aux brèches sédimentaires constituées d'accumulations d'éléments anguleux, mais aussi aux roches broyées le long des accidents tectoniques (brèche de faille ou brèche cataclastique ou cataclasites ou encore mylonites, des produits de broyage extrême. Si la schistosité apparaît et résultant des mouvements différentiels lit par lit, la roche est appelée phyllonite) et aux projections volcaniques grossières recimentées (brèches pyroclastiques).

 

N.B. : Les conglomérats (poudingues) et brèches ne représentent qu'un à deux % (1 à 2%) des roches détritiques et sont généralement d'extension limitée (dans le temps et l'espace). La corrélation stratigraphique de ces unités est difficile, car elles manquent en général à la fois de macro – et de microfossiles.

 

  1. b.   Composition

 

Suite à la grande taille des constituants (plus grande que la taille moyenne des cristaux de la plupart des roches), ce sont les fragments lithiques qui dominent. Comme dans le cas des grès, on peut classer ces fragments en fonction de leur résistance décroissante à l'altération : quartzite, quartz filonien, rhyolite, roches plutoniques et métamorphiques, calcaire, schiste.

 

N.B. : la présence de constituants instables indique un faible transport/altération.

 

  1. c.   Texture (la texture traite des relations de grain à grain dans une roche)

 

Les études texturales sont effectuées directement sur le terrain.                       Le classement est généralement moins bon que dans le cas des grès. De plus, beaucoup de conglomérats présentent une distribution granulométrique bi- ou polymodale. C'est le cas par exemple des conglomérats d'origine fluviatile qui ont un mode pour la matrice sableuse et un mode pour la fraction grossière. Ces deux modes correspondent à deux types de transport différents : traction pour les galets et suspension pour les sables.

 

Il est à noter que les conglomérats très riches en matrice sont encore plus mal classés : ceci reflète leur mise en place par des agents de transport à faible pouvoir de classement tels que glace, courants de turbidité, écoulements en masse.

 

La forme : d’une manière générale, la forme des débris reflète plus la nature des roches que le type d’agent de transport (granites, grès,... donnent des galets grossièrement équidimensionnels alors que schiste, gneiss, des galets allongés). Deux exceptions : les galets striés transportés par les glaciers (Diamictites ou Tillites) et les fameux « dreikanter ou windkanter » façonnés par le vent du désert.

 

L’arrondi : le degré d'arrondi dépend évidemment de la nature du matériau de départ, du type d'agent de transport et de la durée du transport. On a montré que des fragments de calcaire sont bien arrondis après quelques dizaines de km de transport fluviatile. Même des roches aussi résistantes que des quartzites sont bien arrondies après un transport d'une centaine de km.

 

La morphologie de surface (morphoscopie) : contrairement aux sédiments plus fins, où l'étude de la surface des grains exige le MEB, le microrelief des galets est aisément observable. Il inclut les striations (glaciers), les marques d'impact (croissants), les impressions (au cours de la compaction, diagenèse), le poli (éolien).

 

La fabrique ou organisation tridimensionnelle des éléments : les éléments de certains conglomérats possèdent une orientation d'ensemble spécifique: on l'appelle « imbrication ». Les conglomérats d'origine fluviatile, glaciaire, marine, montrent généralement ce type d'imbrication (souvent parallèle, rarement perpendiculaire à la direction de transport), contrairement aux conglomérats et brèches issus d’écoulements gravitaires.

 

  1. d.   Classification

 

Les conglomérats (et brèches) peuvent être qualifiés d’après la dimension de leurs constituants (pisaire, ovaire, céphalaire, etc.), d’après la diversité lithologique plus ou moins grande des galets (conglomérats polymictiques ou polygènes ou encore polygéniques d'une part ; conglomérats oligomictiques ou monogènes ou encore monogéniques d’autre part), selon la provenance locale ou lointaine des cailloux (conglomérats intraformationnels ou extraformationnels) ou encore suivant la nature du liant ou sa proportion (orthoconglomérats : moins de 15% de matrice, structure jointive ; paraconglomérats, plus de 15%, structure empâtée à dispersée).

 

PROTHERO & SCHWAB (1996) proposent une classification dichotomique d'application aisée sur le terrain (Fig. 36).

 

Ce schéma distingue d’abord (1) les conglomérats et brèches intra – et extraformationnels, sur base de la provenance des constituants. Il faut noter que dans le cas d'un conglomérat intraformationnel, c’est-à-dire formé pratiquement sur place, la matrice et les cailloux ont souvent la même lithologie (Conglomérat ou brèche monogène/monogénique).

 

Exemples de brèches ou conglomérats intraformationnels : conglomérats littoraux à éléments calcaires issus du remaniement de copeaux de dessiccation ; conglomérats à éléments argileux formés par des augmentations brutales de la vitesse de courants dans des rivières ou des canyons sous-marins (Galets intraformationnels : fragments de boue légèrement indurée, érodés par les courants).

 

On distingue ensuite (2), sur base de la teneur en matrice (valeur-pivot : 15%), les ortho – des paraconglomérats.

 

ü Les orthoconglomérats sont mis en place par des écoulements d'eau qui opèrent un classement des débris. Les galets sont déposés en période d'écoulement rapide, tandis que la matrice fine est déposée lors de phases de ralentissement de l'agent de transport et elle s’infiltre entre les cailloux (exemples : rivières, plages).

ü Les paraconglomérats par contre, sont généralement déposés par la glace (Tillite ou diamictite) ou les glissements en masse (Turbidite).

 

L'étape suivante (3) consiste à distinguer au sein des conglomérats (extraformationnels), les conglomérats polymictiques (polygéniques) des conglomérats oligomictiques (monogéniques) :

 

ü Dans les conglomérats polymictiques, on observe des éléments de roches moins stables à l'altération comme des basaltes, des schistes et des calcaires. Comme dans le cas des grès, ceci implique un relief vigoureux et/ou une altération chimique faible.

ü Les conglomérats oligomictiques sont formés presqu'exclusivement de quelques variétés de roches très résistantes : quartz filonien, quartzite, chert.

 

Les paraconglomérats sont subdivisés (4) sur la base de la nature et de la fabrique de leur matrice. Ainsi, on observe :

 

ü Des paraconglomérats à matrice argileuse ou argilo-silteuse laminaire dans lesquels les galets, blocs, déforment les laminations proches. Ces blocs sont des « dropstones », c’est-à-dire. soit des éléments amenés par des icebergs ou des débris flottants qui tombent ensuite (fonte, pourrissement du support) sur les sédiments fins du fond marin ou lacustre, soit encore des bombes volcaniques.

ü Des paraconglomérats à matrice non laminaire (plus ou moins carbonatée) sont soit des tillites (d’origine glaciaire donc associés à des galets striés de taille variée, dépôts varvaires, etc.), soit des tilloïdites (formées par des glissements en masse).

 

Fig. 36 : Classification des conglomérats et brèches d'après PROTHERO & SCHWAB (1996).

 

6.2.2. Rudites non consolidées

 

Exemples : Blocailles (sup. à 200cm), cailloutis (dominés par des cailloux de 2 à 20cm et Blocs sup. à 500mm), Sables à galets (galets de 500 – 25mm), Argiles à gravier (Graviers entre 25 – 10mm), Sables et Graviers (2 – 0,2mm), Moraines (Pierres et blocs erratiques transportés par les glaciers).

 

6.3. ARENITES

 

6.3.1. Arénites consolidées

 

  1. a.   Généralités

 

Leur étude s’appuie sur la mesure quantitative et semi-quantitative de trois constituants détritiques principaux : quartz (Q), feldspath (F) et éléments lithiques (L). Les différentes étapes d’étude sont :

 

1er stade : déterminer la classe granulométrique et l’état d’induration (consolidation) ;

2ème stade : procéder, à l’œil nu, à la détermination de la roche par la recherche des grains à quantité prépondérante ;

3ème stade : au laboratoire, on détermine le pourcentage de grains, leur forme, leur nature pétrographique et si possible leur origine.

 

Les arénites consolidées sont représentées par les grès au sens large. Ils sont l'équivalent consolidé des sables, c’est-à-dire des roches dont les constituants détritiques ont une granulométrie comprise entre 2 mm et 63 µm. L'examen montre d'une part une phase granulométrique principale, la plus grossière, qui comporte les grains du grès et d'autre part, soit une matière interstitielle (phase secondaire ou phase liante) qui réunit les grains et qu'on appelle le liant, soit des fluides comme de l'eau, du pétrole, de l'air.

 

Ce liant peut être de nature chimique et représenter une précipitation in situ de matière minérale (silice sous forme d'opale, de calcédoine ou de quartz, carbonate de calcium ou plus rarement hématite, goethite, gypse, anhydrite, etc.) : on parlera dans ce cas du ciment de la roche. Si l'on observe au contraire qu'une phase détritique plus fine occupe les interstices entre les grains de la phase grossière, on parlera d'une matrice intergranulaire, représentant une infiltration mécanique de particules fines entre des grains jointifs (en trois dimensions).

 

Si les grains les plus gros ne sont pas jointifs, on doit considérer que l’on a affaire à un sédiment mal classé où les particules grossières et fines ont été déposées en même temps : on distinguera alors entre un simple empâtement des gros grains dans la matrice silteuse ou argileuse (structure empâtée, caractéristique des « wackes », voir ci-dessous) ou une franche dispersion des gros grains au sein de la matrice (structure dispersée).

 

Dans les structures jointives, on peut avoir un simple ciment de contact, conservant à la roche une porosité importante, mais le plus souvent, le ciment comble la totalité des interstices entre les grains. Dans les "quartzites", les grains de quartz s'entourent d'une auréole d'accroissement formée de quartz, de même orientation optique que le grain détritique. Le phénomène de croissance syntaxique peut être mis en évidence lorsque les grains du sable primitif possédaient un mince revêtement ("coating") d'oxydes de fer.

 

  1. b.   Composition minéralogique

 

La composition minéralogique des grès peut être envisagée sous des aspects très différents :

 

ü Selon la nature minéralogique du liant : grès à ciment siliceux, calcaire, ferrugineux, etc.; et d’après la présence de constituants minéraux exceptionnels (grès glauconifères, micacés,...) ;

ü Par opposition des constituants stables (quartz, débris de chert et de quartzite) aux constituants instables, c’est-à-dire aisément altérables comme les feldspaths, les micas, les débris de roches en général (éléments ou fragments lithiques).

 

Cette distinction conduit à la notion de maturité des sédiments qui se traduit non seulement par la disparition progressive des constituants instables mais également par l’élimination de la matrice argileuse, par l’amélioration du classement granulométrique et par l’augmentation du degré d’arrondi des grains.

 

Passons en revue les constituants majeurs des grès :

 

ü Le quartz (Q) : c’est, en raison de sa résistance à l'altération, de loin le constituant le plus fréquent des grès. Diverses tentatives ont été réalisées quant à la détermination de la provenance des quartz, mais en général, les résultats ont été décevants. On peut dire néanmoins que les quartz monocristallins à extinction ondulante proviendraient de précurseurs plutoniques ou métamorphiques, alors que les quartz à extinction uniforme proviendraient de roches volcaniques ou de grès recyclés. Les quartz provenant de grès recyclés possèdent souvent une relique d’un ciment syntaxique précipité durant un ancien épisode de lithification. La cathodoluminescence peut également aider à distinguer entre quartz de provenances différentes (GÖTTE & RICHTER, 2006, p. ex.) ;

ü Les feldspaths (F) : suite à leur fragilité (clivage) et leur grande altérabilité, les feldspaths forment rarement plus de 10 à 15% des grès. Une proportion importante de feldspaths dans un grès doit donc être considérée comme « anormale ». Elle peut indiquer soit un climat où l'altération chimique est faible (aridité, gel permanent), soit la présence de reliefs, responsables d’un transit rapide des sédiments vers le bassin ;

ü Les fragments lithiques (L) : comme les roches plutoniques ont tendance à se désagréger avant leur incorporation dans le sédiment, les fragments lithiques les plus fréquents sont des morceaux de roches volcaniques, de schistes, de cherts ;

ü Les micas et les minéraux des argiles : les micas sont fréquents dans les grès. Leur granulométrie les range dans les fractions silteuse et sableuse. Les argiles forment la matrice. Il est généralement difficile de déterminer si leur minéralogie est originelle (matériel détritique) ou est le résultat de la diagenèse.

 

  1. c.   Granulométrie

 

Plusieurs méthodes existent suivant les classes granulométriques et le fait que l'on étudie un sédiment meuble ou consolidé. Dans ce dernier cas, en dehors de situations exceptionnelles où il est possible de désagréger le sédiment sans l'altérer (grès à ciment calcaire soluble dans l'HCl), il faut renoncer à faire des analyses granulométriques par tamisage ; on ne peut que procéder à des comptages linéaires sous le microscope, de la façon suivante :

 

ü Le long d’une ligne, on mesure les longueurs interceptées par tous les grains dont la longueur apparente La est égale ou supérieure à une valeur donnée ;

ü La somme des longueurs interceptées, pour une même gamme de longueurs apparentes (par exemple: de 0,1 à 0,2 mm; de 0,2 à 0,3 mm, etc.) représente la fréquence de cette catégorie.

 

Les résultats obtenus par cette méthode sont cependant entachés d'erreurs dues au caractère aléatoire des sections de grains et à l'accroissement des grains par précipitation syntaxique. Au terme d'une étude comparative des granulométries apparentes et réelles de différents sédiments, Friedman (1962) a établi un graphique permettant de comparer la distribution apparente d'un grès sous le microscope à celle qui serait déterminée par tamisage du sable correspondant.

 

Actuellement, l'utilisation de méthodes automatiques basées sur l'analyse d'image permet des développements intéressants dans ce domaine (augmentation de la précision, du nombre d'analyses,...).

 

  1. d.   Classification

 

La plupart des classifications modernes font intervenir la composition minéralogique du grès et sa teneur en matrice fine. La classification la plus utilisée semble être celle proposée par DOTT en 1964 (Fig. 37).

 

Pour combiner la composition minéralogique des grès (évaluée sur un diagramme triangulaire quartz (Q) – feldspath (F) – fragments lithiques (L) avec la teneur en matrice fine (<30 µm), DOTT a choisi de diviser les grès en trois grands groupes : les arénites, les wackes et les mudrocks.

 

 

Fig. 37 : Classification des grès suivant DOTT (1964). Le petit triangle à droite suggère une classification des greywackes lithiques sur base de la nature des fragments rocheux.

Sans nier l’intérêt de cette classification, il faut néanmoins souligner les points suivants :

 

ü Il s’agit d'une classification pétrographique ; elle ne tient pas compte de toutes les données de terrain, souvent très importantes dans l'interprétation d'un grès: structures sédimentaires, géométrie du corps sédimentaire, autres faciès associés latéralement et verticalement ;

ü Elle requiert normalement un comptage de points (500 points en général) ;

ü Les grains autres que le quartz, les feldspaths et les fragments lithiques ne sont pas pris en compte ;

ü La matrice est définie comme la fraction inférieure à 30 µm. A vrai dire, une matrice représente la fraction granulométrique plus fine comblant les interstices entre les plus gros grains d'un sédiment. Le terme implique donc une taille relative et une disposition particulière et non pas une granulométrie particulière ;

ü Les teneurs limites en matrice qui délimitent les domaines des arénites, des wackes et des mudrocks ont été choisies arbitrairement et varient en conséquence d'un auteur à l'autre. Il est clair que ces valeurs arbitraires deviendraient inutiles si l'on prenait en considération la structure d’agrégat : structure jointive pour les arénites et structure empâtée pour les wackes.

 

Nonobstant ces remarques, cette classification a l’avantage d'être très utilisée et elle permet de distinguer quatre grandes familles de roches, correspondant à des origines distinctes, les arénites quartziques, les arkoses, les arénites lithiques et les wackes.

 

ü Les arénites quartziques : sont constituées essentiellement de grains de quartz, chert, quartzite associés à quelques minéraux lourds résistants. Leur couleur est claire. Ce sont des sédiments matures, c’est-à-dire débarrassés des constituants instables, généralement bien triés et dont les grains possèdent un bon arrondi. Ce type de sédiment s’observe depuis la base de la zone d'action des vagues de tempête jusqu'au milieu continental: plages, dunes, barrières, rides, etc... Le matériau provient typiquement de l'érosion de zones continentales stables à relief faible.

ü Les arkoses ou arénites feldspathiques : sont composées principalement de quartz et de feldspath. Ce sont des roches claires, souvent roses ou rougeâtres. L'orthose et le microcline sont plus abondants que les plagioclases quand la croûte continentale représente la source principale du sédiment; dans le cas contraire, une source volcanique doit être suspectée. On y observe aussi des micas et des fragments de roches. Les arkoses ne sont pas des sédiments aussi matures que les arénites quartziques : elles sont généralement plus grossières et moins bien triées que ces dernières (sauf certaines arkoses éoliennes de milieu désertique). Beaucoup d'arkoses sont des sédiments continentaux, de type cône alluvial, « point bar » de rivière, voire plage. La présence du feldspath implique, comme dit plus haut, un climat aride (désertique ou arctique) et/ou un relief accusé (soulèvements récents, failles actives). Certaines arkoses sont des « reliques », accumulées en tout début de transgression marine et surmontées par des arénites quartziques.

 

ü Les arénites lithiques : sont constituées de fragments de quartz et de roches diverses. Le mélange de quartz et de débris divers leur donne un aspect "poivre et sel". Les feldspaths sont généralement peu abondants, les micas sont communs. Ces sédiments s'observent aussi bien dans des cônes alluviaux que des turbidites. Il s'agit de dépôts immatures, à proximité de reliefs vigoureux.

 

ü Les wackes (graywackes) : ce sont des roches généralement sombres, constituées d'une matrice et de grains de quartz, de chert, de calcaire, de roches volcaniques, de schiste, de feldspath (souvent anguleux). Il s'agit de sédiments immatures, mis en place par des courants de turbidité. On y retrouve en effet les granoclassements et les autres structures sédimentaires produites par ce type d'agent de transport et de dépôt. Il faut faire attention au caractère primaire de la matrice et veiller, pour l'interprétation, à ce qu'il ne s'agisse pas plutôt d'une arkose dont les grains de feldspath ont été complètement altérés.

 

Nous pouvons admettre, dans le cadre de cet enseignement, la classification suivante :

 

ü Groupe de grès au sens large : quartzarénites ou orthoquartzites avec plus 75% de quartz.

 

    Classe des grès au sens strict = Grès quartzeux (Qtz > 90% et F+L≤10%),

    Classe des grès feldspathiques (Qtz entre 75 et 90% ; F+L entre 10 et 25% ; avec F>L),

    Classe des grès lithiques (Qtz entre 75 et 90% ; F+L entre 10 et 25% avec L>F).

 

N.B. : Grès sont de roches formées de grains de sable (plus de 75 % de quartz) enrobés dans un ciment. Les termes grès et sables sont purement descriptifs que pétrographiques.

 

ü Groupe d’arkose au s.l. ou feldarénites ou encore feldsparénite : roches ayant plus de 25% de feldspath et de débris lithiques avec plus de feldspath que de débris lithiques.

 

    Classe de l’arkose au sens strict (F/F+L > 90% avec Qtz < 75%),

    Classe de l’arkose lithique (F/F+L < 90% avec F>L).

 

ü Groupe de litharénite au s.l : roches ayant plus de 25% de feldspath et de débris lithiques avec plus de débris lithiques que de feldspaths.

 

    Classe de litharénite au sens strict (L/F+L > 90%, F+L>25% et Qtz < 75%), Ex. Cas de Grauwacke ou graywacke ou greywacke (Wackes).

    Classe de litharénite feldspathique (L/F+L < 90%, F+L>25% et Qtz < 75% avec L>F).

 

Les variétés des grès sont les suivantes :

 

ü Arkose : Grès riche en feldspaths, généralement rougeâtre, habituellement grossière et mal triée, avec de nombreux fragments anguleux.

ü Quartzite : Grès au sens strict, très riche en quartz (au minimum 85 %), à ciment siliceux souvent recristallisé. Il ne doit pas être confondu avec le quartzite métamorphique, même si cette distinction ne peut être faite qu’en lames minces.

ü Grauwacke : ce sont de grès litharénite de couleur grise à gris-vert (présence de glauconie = illite riche en fer) avec au moins 25 % de feldspaths. Roche très compacte, solide du fait de la recristallisation du ciment siliceux. Roches contenant des débris des roches volcaniques, une matrice argilo-silteuse sombre, des minéraux sous forme de grain anguleux et un faible classement.

6.3.2. Arénites non consolidées

 

Elles correspondent au sable, le terme sable étant employé sous l’aspect granulométrique et non pas sous l’aspect minéralogique. On distingue différentes catégories :

 

ü Sables quartzeux (Quartz > 90%),

ü Sables feldspathiques, Quartz ˂ 90%  (L + F  > 10% avec F/L+F >90% ; F = feldspath  et L =  débris lithiques),

ü Sables lithiques, Quartz ˂ 90% (L + F >  10% avec L/L+F >90%),

ü Sables feldspatho-lithiques : Quartz ˂ 90%, F et L > 10%  avec F > L,

ü Sables litho-feldspathiques : Quartz ˂ 90%, F et L > 10%  avec L > F.

                                                                  

N.B. : Arène  =  sable résultant de l’altération sur place de granite. Il est feldspathique et lithique.

 

6.4. LUTITES

 

6.4.1. Lutites consolidées

 

  1. a.   Généralités

 

Dans cette classe, on parle du mot schiste. Il faudra noter que ce mot n’est réservé qu’aux seules roches ayant un débit schisteux. Il ne porte pas de signification granulométrique ni de composition. On y trouve du quartz très fin et des argiles M (c’est-à-dire des microphyllittes et des macrophyllites). On considère que les argiles M recouvrent les argiles G. Les microphyllites peuvent être subdivisées en deux groupes principaux : groupe des siltites (silts) et groupe des argilites (argiles). Le mot shale est une argilite ou une siltite fine (˂ à 25µm) et feuilletée.

 

Les sédiments argileux et silteux représentent entre 50% et 80% de la colonne stratigraphique. Leur étude pétrographique et leur classification est moins avancée que celle des grès et des calcaires, en raison de leur granulométrie très fine, en partie sous le pouvoir de résolution du microscope. Leur importance économique est cependant grande, avec des applications industrielles multiples comme la fabrication des ciments, des briques, des céramiques, etc.

  1. b.   Composition

 

La composition des roches silto-argileuses est relativement constante : le shale (voir ci-dessous) moyen comprendrait 30% de quartz, 10% de feldspath et 50% de minéraux argileux (ou de micas), avec les 10% restants constitués de carbonates ou d'oxydes de fer. Les minéraux argileux sont le produit de l'altération de roches sédimentaires, métamorphiques et ignées. Ces dernières ne contiennent pas de minéraux argileux préexistants, mais un de leurs constituants, les feldspaths, sont aisément dégradables en argiles.

 

La nature des minéraux argileux (diffraction X) des roches détritiques a souvent été utilisée comme indicateur de paléoenvironnement ou de diagenèse (voir ci-dessous).

 

  1. c.   Classification

 

Ces roches appartiennent au grand groupe des « mudrocks » (littéralement « roches de boue ») des géologues anglais. Ce groupe comprend tous les sédiments siliciclastiques constitués majoritairement d'éléments de la taille des silts (1/16 à 1/256 mm ou 0,062 à 0,004 mm ou encore 63 à 2µm) et des argiles (< 1/256 mm ou 0,004 mm ou encore 2µm).

 

Le tableau 5 suivant est une proposition de classification, basée sur les commentaires de LUNDEGARD & SAMUELS (1980) :

Sédiments

meubles

Indurés

faible métamorphisme

métamorph. plus élevé

silt

Siltite

quartzite

2/3 silt

mud

NON LAMINAIRE: mudstone, siltite argileuse?

LAMINAIRE et FISSILE (// à S0): mudshale, siltite argileuse?

CLIVAGE: slate, schiste silto-argileux

argillite (pas de clivage)

CLIVAGE: schist, ardoise, phyllade

1/3 silt

clay (argile)

NON LAMINAIRE: claystone, argilite?

LAMINAIRE et FISSILE (// à S0): clayshale

CLIVAGE: slate, schiste argileux

argillite (pas de clivage)

CLIVAGE: schist, ardoise, phyllade

Tableau 5 : classification des "mudrocks" (les termes français sont en italique)

 

Ce tableau montre que le vocabulaire français est moins précis que le vocabulaire anglo-saxon: nous manquons de mots pour désigner les shales et les mudstones (notons que ce terme anglais peut amener la confusion avec les mudstones calcaires).

 

Les shales sont donc des argiles compactées, plus ou moins riches en silts, présentant une fissilité parallèlement à la stratification. En Belgique, on utilise souvent sur le terrain, le terme « schiste » (= « slate ») qui doit s'appliquer à une roche indurée de granulométrie fine, affectée d'une schistosité (c’est-à-dire d'un clivage dû à une dissolution et une simple réorientation des minéraux sous l'effet des pressions tectoniques). Les termes ardoise ou phyllade par contre, impliquent un métamorphisme: la plus grande partie des minéraux ont recristallisé, des espèces nouvelles sont apparues. Les minéraux ainsi développés sont allongés dans des plans perpendiculaires à la pression tectonique ou lithostatique. Parallèlement à ces plans, la roche se débite en fines plaquettes luisantes, d'aspect finement cristallin.

 

L'analyse granulométrique proprement dite ne peut être pratiquée que sur des sédiments meubles. La détermination des différentes classes est basée sur des techniques appliquant la loi de Stokes.

 

A la classification granulométrique des sédiments s'ajoutent d'autres caractéristiques, celles-ci résultant soit d'analyses microscopiques, soit d'observations macroscopiques :

 

ü La coloration, en cassure fraîche pour les roches indurées (utiliser éventuellement une échelle de teintes). Il s'agit d'une caractéristique importante qui renseigne sur l'état d'oxydation du fer (Fe3+ rouge; Fe2+ vert) et sur la présence de matière organique (schistes noirs) ;

ü La présence de bioturbations, de laminations ;

ü La minéralogie de la fraction silteuse (quartzitique, feldspathique, micacée, chloritique).

Cette dernière caractéristique, nous pousse à parler de la classification des lutites consolidées qui prend en compte les constituants principaux suivants : les argiles minéralogiques (Am), les macrophyllites (M) et le quartz (Q) qu’on place au sommet d’un triangle (Fig. 37).

 

 

Fig. 38 : Diagramme de classification des lutites consolidées

 

Domaine des roches à métamorphisme naissant car les roches à très fortes proportion de micas n’appartiennent pas généralement aux roches sédimentaires mais aux roches métamorphiques.

 

ü 1a : siltite quartzeux, 80% ˂ Q ˂ 100% avec micas ˂ 10% et Am ˂ 10% (Q > M, Q > Am) ;

ü 1b : siltite quartzo – micacée, 25% ˂ Q ˂ 90% avec 10% ˂ micas ˂ 50%  et 0 ˂ Am ˂ 50% (Q > M) ;

ü 1c : siltite quartzo – argileuse, 40% ˂ Q ˂ 90% avec 0% ˂ micas ˂ 10%  et 10% ˂ Am ˂ 50% (Q > M) ;

ü 2 : siltite micacée, 0% ˂ Q ˂ 50% avec 50% ˂ micas ˂ 100%  et 0% ˂ Am ˂ 50% (M > Q) ;

 

N.B. : D’une manière générale, on parle de siltite lorsque Q + M > 50%.

 

ü 3a : Argilite s.s., Q˂10%, micas ˂ 10%  avec 50% ˂ Am ˂ 80% (Q >M) ;

ü 3b : Argilite quartzeuse, 10% ˂ Q ˂ 50% avec 0% ˂ micas ˂ 10%  et 50% ˂ Am ˂ 90% (Q > M) ;

ü 3c : Argilite quartzo - micacée, 10%˂Q˂ 40% avec 10% ˂ micas ˂ 25%  et 50% ˂ Am ˂ 80% (Q > M) ;

ü 3d : Argilite micacée – quartzeuse, 10% ˂ Q ˂ 25% avec 10%˂ micas˂40%  et 50% ˂ Am ˂ 80% (M > Q) ;

ü 3e : Argilite micacée, 0 ˂ Q ˂ 10% avec 10%˂ micas˂50%  et 50% ˂ Am 90% (M > Q) ;

 

6.4.2. Lutites non consolidée

 

Ce sont des lutites meubles gorgées d’eau, à éléments détritiques très fins (sablons, limon, argiles) à colloïde en grande partie d’origine biologique (bactéries, diatomées, pollens, humus), à hydroxyde et sulfure de fer.

 

Les vases sont souvent silteuses mais généralement pauvres en calcaire. Elles sont abondantes sur le fond marin et pour certains auteurs, les vases se situent sur le plateau continental tandis que les boues tapissent les grands fonds marins. Pour d’autres auteurs, la vase est essentiellement le siège d’une activité biogéochimique due aux bactéries.

 

Le terme glaise désigne une argile très plastique utilisée comme terre de poterie et très riche en argile M, imperméable et grasse. Tandis que le terme limon a un sens granulométrique précis (20 à 50 µm). Il désigne une formation continentale souvent fluviatile avec une composition d’un silt quartzo – argileux ferrugineux. Il est parfois d’origine lagunaire ou éolienne.

 

Enfin, le loess est un dépôt éolien meuble, non stratifié, jaunâtre avec une granulométrie des lutites argilo – silteuses. Il comporte des minéraux détritiques très variés : un peu d’argile M et un peu de carbonate.

 

 

6.5. ROCHES DE MELANGE LUTITES – ARENITES

 

On les considère constituées de 3 groupes d’éléments : Argile M (Ar), Silt (Si) et sable (Sa) (grains de 63 µm à 2mm). On distingue ainsi 3 grands groupes :

 

ü Groupe d’argilites,

ü Groupe de siltites,

ü Groupe d’arénites.

 

Fig. 39 : Dénomination granulométrique d’un sédiment moyen à fin (Exemple Si Ar = Silt argileux, Ar si-sa= Argile silto-sableuse ou argilite silto-sableuse) (CHAMLEY H., 1987, modifiée).

 

6.6. ROCHES DE TRANSITION ENTRE ROCHES DETRITIQUES ET ROCHE CHIMIQUES (ROCHES MIXTES – CALCAIRES ET TERRIGENES)

 

Les roches détritiques terrigènes peuvent en partie être d’origine chimique. Il existe plusieurs ponts entre les roches détritiques terrigènes et les roches chimiques. La présence d’éléments chimiques se manifeste souvent dans la phase ciment des roches détritique grossières.

 

Dans la roche de la classe de lutite où la distinction entre ce qui est ciment et ce qui ne l’est pas n’est pratiquement pas possible, il faut considérer autrement les roches de transition. Exemple : une roche faite d’argile M, de carbonates et de silice très fine pourrait n’est pas être détritique ou tout simplement l’origine détritique n’est pas évidente.

 

Les argiles M sont fréquemment détritique et peuvent être toutefois transformées ou néoformées. Les carbonates fins ont en général une origine difficile à préciser mais souvent chimique dans le cas de micrite ou biochimique dans le cas de la biomicrite. La silice peut être d’origine chimique ou biochimique et peut exister sous diverses formes minéralogiques. Exemple : quartz, calcédoine, opale. La différence entre l’origine chimique et l’origine détritique n’est toutefois toujours pas facile à déterminer dans les phases très fines. Considérons une roche constituée par les 2/3 de ce groupe :

 

ü 1 : Groupe des argiles,

ü 2 : Groupe de la silice,

ü 3 : Groupe des carbonates et,

ü 4 : Groupe des marnes.

 

A partir de ces 4 groupes, on obtient quatre séries :

 

ü 1ère série : Argilo – carbonatée (Schiste, Schiste calcareux, Marne, calcaires argileux et calcaire)

ü 2ème série : Argilo – siliceuse (Grès, Grès argileux, schistes siliceux et schiste),

ü 3ème série : Silico – carbonatée  (grès, grès calcareux, calcaires siliceux et calcaire),

ü 4ème série : mixte occupant le centre du triangle.

 

 

Fig. 40 : Diagramme de classification des roches de transition (roche détritique – roches chimiques).

 

Tous les intermédiaires existent entre les calcaires purs et les argilites pures. Lorsque la teneur en argiles d’un calcaire est comprise entre 5 et 35 %, la roche est un  calcaire marneux ou marne calcareuse, entre 35 et 65 %, une marne, entre 65 et 95 %, une marne argileuse, et à plus de 95 % une argilite alors qu’à moins de 5% la roche est un calcaire.

 

L’origine de ces roches (marne et argilite) est diverse. Certains éléments proviennent de l’altération de roches préexistantes comme le quartz hérité du granite mais surtout les argiles issues de son altération ; d’autres sont néoformés en domaine sédimentaire comme certaines argiles et la fraction carbonatée lorsqu’elle est présente. Les environnements de dépôts, divers, sont tous caractérisés par leur très faible agitation. Il peut s’agir de dépôts lacustres ou lagunaires, de dépôts d’estuaire où se produit la floculation des argiles, de dépôts littoraux en zone abritée, de dépôts sur la plateforme externe (au-delà de 50 m, limite d’action des tempêtes), ou enfin de dépôts de bassin océanique du large. Ces formations, lorsqu’elles contiennent de la matière organique, peuvent constituer des roches mères potentielles de pétrole.

BIBLIOGRAPHIE

 

 

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  1. COJAN I. et RENARD M., 2006. Sédimentologie, 2e edition, Dunod, 444p.

 

  1. FOLK R.L., 1959. Pratical classification of limestone, AAPG Bulletin, 43.

 

  1. FOLK R.L., 1980. Petrology of sedimentary rocks, Hemphills, Austin, 182p.

 

  1. PROTHERO D. et SCHWAB F., 1998. Sedimentary geology (an introduction to sedimentary rocks and stratigraphy). Freeman & Co, 422p.

 

  1. READING H.G., 1996. Sedimentary environments: processes, facies and stratigraphy. Blackwell, 688p.

 

10. TUCKER M., 2001. Sedimentary petrology, 3rd edition, Blackwell, 262p.

 

11. POMEROL C. et RENARD M., 1997. Eléments de géologie, 11e édition, Coll. Enseignement des Sciences de la Terre, Ed. Masson, Paris.

 

12. POMEROL C., LAGABRIELLE Y., RENARD M. et GUILLOT S., 2011. Eléments de géologie, 11eédition, Ed. Dunod, Paris, 959p.

 

13. REINECK H-E et SINGH I.B., 1980. Depositional sedimentary environments, Springer, 549p.

TABLE DES MATIERES

 

 

 

0. INTRODUCTION GENERALE. 1

PREMIERE PARTIE : SEDIMENTATION ET GENESE DES ROCHES EXOGENES. 3

CHAPITRE I. SEDIMENTATION.. 3

1.1. GENERALITES. 3

1.2. AIRES D'ACCUMULATION DES SEDIMENTS A LA SURFACE DU GLOBE. 3

1.3. FACTEURS DE FORMATION DES ROCHES DETRITIQUES ET PROCESSUS DE LA SEDIMENTATION DANS LE CYCLE GEOLOGIQUE. 8

1.3.1. Facteurs de formation des roches détritiques. 8

1.3.2. Processus sédimentaire dans le cycle géologique. 8

CHAPITRE II. GENESE DES ROCHES EXOGENES. 11

2.1. ALTERATION OU DESAGREGATION D’UNE ROCHE. 11

2.1.1. Actions physiques ou mécaniques. 12

2.1.2. Actions organiques ou biologiques. 14

2.1.3. Actions chimiques. 16

2.2. EROSION ET TRANSPORT. 20

2.2.1. Action de la pesanteur. 20

2.2.2. Action de l’eau courante. 21

2.2.3. Action de l'eau dans le milieu marin. 24

2.2.4. Action du vent. 25

2.2.5. Action de la glace. 26

2.3. MILIEUX DE SEDIMENTATION.. 27

2.3.1. Milieu continental 27

2.3.2. Milieu marin. 31

2.3.3. Milieux mixtes. 37

DEUXIEME PARTIE : PETROLOGIE DES ROCHES EXOGENES. 43

CHAPITRE III. SEDIMENT. 43

3.1. PETROGRAPHIE SEDIMENTAIRE. 43

3.1.1. Caractères pétrographiques du sédiment. 43

3.1.2. Morphoscopie. 45

3.1.3. Granulométrie. 46

3.1.4. Disposition des particules. 50

3.2. STRATONOMIE. 52

3.2.1. Stratification et le litage. 52

3.2.2. Figures sédimentaires. 54

3.3. ANALYSE SEQUENTIELLE. 57

3.3.1. Série virtuelle. 57

3.3.2. Séquences lithologiques. 58

3.3.3. Séries rythmiques. 60

CHAPITRE IV. ROCHES CALCAIRES. 64

4.1. GENERALITES. 64

3.2. ALLOCHEMS. 65

3.2.1. Lithoclastes. 65

3.2.2. Pelles ou granules (pelotes). 66

3.2.3. Ooïds. 67

3.2.4. Fossiles. 68

3.2.5. Pseudoallochèmes. 68

3.3. ORTHOCHEMES. 68

3.3.1. Micrite ou calcite cryptocristalline. 69

3.3.2. Calcite spathique ou sparite (sphary calcite). 69

3.4. CLASSIFICATION DES ROCHES CARBONATEES. 69

CHAPITRE V. ROCHES DOLOMITIQUES. 72

5.1. GENERALITES. 72

5.2. ETAT CRISTALLOGRAPHIQUE ET MINERALOGIQUE DU MINERAL DOLOMITE. 72

5.2.1. Généralités. 72

5.2.2. Divers types de carbonates magnésiens. 73

5.2.3. Stabilité du carbonate calco-magnésien. 73

5.3. CLASSIFICATION DES DOLOMIES. 74

5.3.1. Série allant des calcaires aux dolomies. 74

5.3.2. Classification basée sur la teneur en Ca et Mg. 74

5.3.3. Classification basée sur la texture (et structure). 75

5.3.4. Classification en fonction du mode de gisement, du faciès pétrographique et des particularités physicochimiques  75

5.4. DONNEES PHYSICO-CHIMIQUES COMPLEMENTAIRES. 76

5.4.1. Densité, porosité, perméabilité et rigidité. 76

5.4.2. Thermoluminescence. 77

5.4.3. Propriétés isotopiques. 77

5.4.4. Inclusions fluides. 78

5.4.5. Eléments en trace et fractions insolubles. 78

5.5. PARAGENESES COMPLEXES, DIAGENESES POLYPHASEES ET METAMORPHISME. 78

5.5.1. Gypse et anhydrite. 78

5.5.2. Argiles magnésiennes. 79

5.5.3. Phyllosilicates ferreux. 79

5.5.4. Silice. 79

5.5.5. Minéralisation associées aux dolomies. 79

5.5.6. Métamorphisme. 80

5.6. PROBLEME DE LA DIAGENESE DES CARBONATES ET DE LA FIXATION BIOLOGIQUE DE MAGNESIUM DANS LES TESTS  80

5.7. ENRICHISSEMENT MAGNESIEN DIRECT PAR L’EAU DE MER ET FORMATIONS DOLOMITIQUES AUTHIGENES ET DOLOMITIQUES RESEDIMENTEES. 81

5.8. FACTEURS IMPORTANTS DE LA DOLOMITISATION.. 82

CHAPITRE VI. ROCHES DETRITIQUES TERRIGENES (RDT). 84

6.1. CLASSIFICATION ET PRINCIPES GENERAUX. 84

6.1.1. Facteurs de la composition. 84

6.1.2. Critères de classification des roches détritiques. 85

6.1.3. Classification granulométrique. 85

6.1.4. Classification pétrographique. 87

6.1.5. Classement et notion de degré d’évolution. 88

6.1.6. Ciment et matrice. 91

6.2. NOMENCLATURE DES RUDITES. 92

6.2.1. Rudites consolidées. 92

6.2.2. Rudites non consolidées. 96

6.3. ARENITES. 96

6.3.1. Arénites consolidées. 96

6.3.2. Arénites non consolidées. 104

6.4. LUTITES. 104

6.4.1. Lutites consolidées. 104

6.4.2. Lutites non consolidée. 108

6.5. ROCHES DE MELANGE LUTITES – ARENITES. 109

6.6. ROCHES DE TRANSITION ENTRE ROCHES DETRITIQUES ET ROCHE CHIMIQUES (ROCHES MIXTES – CALCAIRES ET TERRIGENES). 110

BIBLIOGRAPHIE. 112

TABLE DES MATIERES. 113

 

 



22/09/2020
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